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ni les journaux allemands, ni les déclarations du chancelier de l’empire ne nous permettent de nous méprendre sur ce qu’il a eu d’intentionnel.

Nous ne citerons qu’une note de la Gazette de l’Allemagne du Nord, parce que le caractère officieux de ce journal est connu, et parce que les autres n’y ont pas ajouté grand’chose. La Gazette de l’Allemagne du Nord, après avoir fait allusion à un article du Temps, s’est demandé « comment la politique française accordera dans la pratique ces deux conceptions : souveraineté du sultan et autorité de la France. Par conséquent, dit-elle, si rien du côté de la France n’a été fait pour donner aux intéressés non français une explication au sujet de cette apparente contradiction, nous devons bien constater qu’aucune garantie n’est venue jusqu’à présent confirmer l’attente du comte de Bülow, à savoir que les intérêts économiques de l’Allemagne au Maroc n’auront rien à souffrir de la part d’aucune nation. » La Gazette de l’Allemagne du Nord fait ensuite allusion à la Tunisie, où elle affirme que le protectorat français a abouti à une exclusion presque complète des intérêts non français. Elle exprime l’espoir que rien de semblable n’est à prévoir au Maroc, et en conclut que, « pour le moment, » il n’y a « absolument aucun motif d’envisager même la possibilité que soient troublés les rapports corrects qui existent entre la France et l’Allemagne. » Nous en sommes convaincus, en effet, et non seulement pour le moment, mais pour la suite.

Loin de nous la pensée d’entrer en polémique avec la Gazette de l’Allemagne du Nord au sujet de la Tunisie. Le reproche d’en avoir presque complètement exclu les intérêts non français est à coup sûr bien injuste et il nous serait facile de le réfuter. Mais à quoi bon ? Nous n’avons pas l’intention de procéder au Maroc comme en Tunisie. Notre action peut s’exercer sous des formes et à des degrés très divers. En Tunisie même, elle n’aurait peut-être pas eu besoin de devenir un protectorat formel, si nous avions pu d’avance nous entendre avec l’Italie, comme nous venons de le faire avec l’Espagne et l’Angleterre. Au reste, l’Allemagne a toujours dit, par ses organes officiels et officieux, à la tribune du Reichstag et dans la presse, qu’elle n’avait aucun intérêt politique au Maroc. Ni l’Angleterre, ni l’Espagne n’auraient fait une déclaration analogue, car elles avaient incontestablement l’une et l’autre des intérêts politiques au Maroc. Dès lors, il serait imprévu, on nous permettra de le dire, que les explications et les assurances que nous avons données à ces deux puissances, et qui les ont satisfaites, parussent insuffisantes à l’Allemagne. Celle-ci n’a,