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harmonique des animaux et des végétaux vis-à-vis de l’atmosphère qui les entoure. Cet antagonisme et cette harmonie sont résumés et matérialisés en quelque sorte dans la célèbre expérience de Priestley. Une souris enfermée sous une cloche de verre vicie l’air contenu et ne tarde pas à périr ; une plante verte introduite dans cet air confiné restitue à celui-ci sa pureté première, et le rend apte à entretenir la vie de l’animal. Isolément, chacun succomberait, réunis, ils vivent. L’animal et la plante altèrent l’atmosphère dans des sens opposés et de manières qui se compensent.

Le célèbre chimiste anglais à qui l’on doit tant de découvertes de premier ordre et, entre autres, celle de l’oxygène, venait d’apercevoir le lien nécessaire qui unit le règne végétal au règne animal et l’un et l’autre à l’atmosphère ambiante, c’est-à-dire au monde minéral. L’intervention des phénomènes de la vie végétale et animale dans la constitution de l’atmosphère révélait une des plus remarquables harmonies naturelles. La science générale venait de faire l’une de ses plus brillantes conquêtes.

L’antagonisme harmonique des animaux et des végétaux verts prit de 1830 à 1840, entre les mains de l’école chimique, représentée par J. -B. Dumas et Boussingault, une précision extrême et devint une doctrine véritable. J. -B. Dumas surtout l’a exposée avec beaucoup d’éclat et de clarté. Cette doctrine est devenue celle de la Dualité vitale. Elle consiste à regarder le règne animal, dans son ensemble, comme le parasite du règne végétal. Le monde animal, dans cette manière de voir, est un instrument de destruction, ou d’analyse des composés chimiques immédiats qui constituent l’organisme vivant, tandis que le règne végétal, dans son ensemble également, est un instrument de synthèse ou de formation des mêmes principes. Les animaux tirent des plantes les quatre principales catégories de leurs alimens : hydrates de carbone, graisses, substances azotées protéiques et substances minérales : ils les en tirent directement, s’ils sont herbivores, purs, indirectement et par l’intermédiaire des herbivores si leur régime est carnassier. Quant à eux, ils ne font que les détruire. Ainsi toute la synthèse est d’un côté ; elle a pour ouvriers les plantes vertes et pour primum movens ou énergie, celle de la radiation solaire. Toute l’analyse est de l’autre côté ; elle est le fait des animaux.

C’est là une erreur. De ce que, chez les plantes vertes en