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que l’on assista au dramatique épilogue de la guerre qui avait, pendant six mois, fait de la ville de Louis XIV le quartier général ennemi. A Trianon, ce séjour de plaisance devenu une geôle, on vit un maréchal de France, dont la carrière n’avait pas été sans éclat et qu’en un jour d’espoir on avait même appelé « le glorieux Bazaine, » s’effondrer sous le poids d’une accusation de haute trahison. Qui ne se souvient, s’il l’a entendue, du lamentable effet produit par une plaidoirie qui, comme argument suprême, pour prouver que le commandant en chef de l’armée de Metz avait fait son devoir, invoquait le témoignage envoyé, avec une dédaigneuse pitié, par le bénéficiaire de la capitulation, le prince Frédéric-Charles ? Qui ne se rappelle l’éloquent, le vivant récit de la bataille de Saint-Privat par Canrobert, et surtout la réplique du duc d’Aumale, qui présidait ces mémorables débats, lorsque à l’accusé, qui, pour excuser l’oubli et la violation des règlemens militaires, avait cru devoir dire qu’il n’y avait, après le 4 septembre, plus de gouvernement légal, il répondit : « Mais il y avait la France, monsieur le maréchal. »

Depuis lors, sans parler des huit années durant lesquelles il fut la résidence officielle des pouvoirs publics, non plus que des congrès qui s’y réunirent, soit pour la révision des lois constitutionnelles, soit pour les diverses élections présidentielles, Versailles a connu des heures moins affligées. Avant de voir, dans cette même galerie des Glaces, qui avait entendu proclamer le rétablissement de l’empire d’Allemagne, le Tsar et la Tsarine consacrer par leur présence une alliance célèbre, on y avait assisté, le 5 mai 1889, à la célébration du centenaire de la réunion des États généraux. Ce jour-là, le président de la République, — celui qui devait tomber sous les coups d’un assassin, — demanda à la nation « de chercher dans l’esprit d’apaisement, de tolérance mutuelle, de concorde, la force irrésistible des peuples unis. » Inscrite déjà dans le programme de 1789, comme jadis dans le préambule de l’Edit de Nantes, cette noble pensée serait-elle, à jamais, condamnée à rester, à l’horizon de la France, un rêve ou un regret ? En sera-t-il d’elle comme du monument, qui, aux termes d’une loi promulguée, il y a un quart de siècle, devait être érigé pour la commémoration des États-Généraux, sur l’emplacement de la salle construite dans l’hôtel des Menus-Plaisirs, situé entre l’avenue de Paris et la rue des Chantiers, où ils se réunirent le 5 mai et où siégea ensuite