Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/589

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tout nouveau, leur esprit d’imitation, leur dextérité, leurs habitudes de soin leur permettront de le faire très vite et très bien. Veut-on modifier au contraire la pratique d’un art qu’ils connaissent déjà, la routine héréditaire reprend le dessus presque invinciblement ; moralement ils se refusent à comprendre la raison d’être d’un changement, matériellement ils ont la plus grande peine à s’y accoutumer. Il est plus aisé, en Chine, de faire d’un manœuvre un bon mécanicien que d’enseigner à un artisan à se servir d’un nouvel outil.

C’est pourquoi le principe le plus efficace de rénovation économique en ce pays doit être surtout non l’amélioration des procédés dans les branches de production déjà connues, mais l’introduction d’industries toutes nouvelles qui, loin de porter ombrage aux indigènes en leur enlevant du travail, leur en donneront au contraire. Les Européens doivent exploiter les richesses naturelles que les Chinois ont laissées dormir jusqu’ici. Or presque toutes les ressources du sous-sol sont dans ce cas, et c’est l’un des traits les plus caractéristiques de la civilisation moderne que l’importance prise par les richesses minérales qui, à l’exception des pierres à bâtir, n’en avaient aucune aux époques antérieures. Il est devenu banal de parler des immenses gisemens miniers, des réserves de houille presque inépuisables de la Chine. On ne peut même pas dire qu’ils aient été effleurés par les Chinois : les salines de Tse-liou-tsen dont nous parlions tout à l’heure sont une exception et c’est à peine si en quelques endroits on a gratté un peu le sol pour en extraire, par quantités infimes, de l’or ou de l’argent, du cuivre ou de l’étain. La province du Shan-si et les régions limitrophes du Honan, au sud-ouest de Pékin, peuvent devenir un des plus grands centres métallurgiques du monde, avec leurs colossaux gisemens de houille et de minerais de fer. Au sud du Yang-tze, sont d’autres bassins houillers presque aussi importans et, dans les montagnes, les métaux les plus divers en grandes quantités. Le pétrole, si recherché, et si parcimonieusement répandu par la nature dans les pays connus jusqu’ici, paraît exister aussi dans l’ouest. L’exploitation des mines, voilà, semble-t-il, la tâche essentielle, rémunératrice et rénovatrice que devraient s’assigner les Européens en Chine.

On commence à se mettre à l’œuvre graduellement, mais on ne peut obtenir de résultats effectifs qu’au fur et à mesure de la construction des chemins de fer qui permettent d’amener sur place