parlait, on était accusé d’exagérer. Comment faire croire, sans en apporter des preuves matérielles absolument irréfutables, qu’un commandant de corps d’armée avait pu être sacrifié au caporal-bottier d’un de ses régimens, parce que ce dernier était franc-maçon ? C’est pourtant bien ce qui était arrivé. M. le général Tournier a été privé de son commandement pour n’avoir pas consenti à se faire le très humble serviteur de la loge maçonnique de Clermont-Ferrand. La cause de sa disgrâce est là et non pas ailleurs. Lorsque son affaire a été portée à la tribune de la Chambre, on a été frappé de l’accent de colère et presque de haine avec lequel M. le général André a parlé de lui, et c’est plus tard seulement qu’on s’en est expliqué la brutalité et l’amertume. Quel était le tort de M. le général Tournier, sinon de s’être montré réfractaire au régime de délation que d’autres pratiquaient sans pudeur ? Ce régime ayant été désavoué par le gouvernement et condamné par le Parlement, il s’agissait de savoir si M. le général Tournier serait, ou non, remis en activité dans des fonctions analogues à celles qu’il avait exercées ? M. le ministre de la Guerre a commencé par le nommer membre d’un comité. C’était quelque chose, mais pas assez. On ne pouvait voir dans cette mesure qu’un commencement. La suite n’a pas tardé à venir : M. le général Tournier a été replacé à la tête d’un corps d’armée. Il a été compris, — et le fait en est encore plus significatif, — dans le mouvement provoqué par la mise en disponibilité de M. le général Peigné. On ne pouvait demander, ni attendre davantage, au moins sur ce point ; mais il n’en était pas de même sur tous les autres. Plusieurs officiers de réserve, au nombre desquels se trouve M. Guyot de Villeneuve, avaient été injustement frappés. Si M. le ministre de la Guerre n’a pas formellement promis de leur rendre leur grade dans la réserve, il a laissé entendre qu’il le ferait. C’est ce que la Chambre a compris et ce que l’opinion a d’avance approuvé. Mais qu’en sera-t-il ? Les radicaux-socialistes se mettent en travers de ces dispositions, et nous parlerons dans un moment de leurs démarches. Le gouvernement cédera-t-il, ou ne cédera-t-il pas aux radicaux-socialistes ? Peut-être ne le sait-il pas lui-même très bien. Cela dépendra des sollicitations dont il sera l’objet d’un autre côté et de l’énergie qu’on y déploiera, car nous avons affaire à un gouvernement qui a besoin qu’on le pousse. Il ne se meut pas à lui tout seul.
Toutefois, M. Rouvier mérite d’être loué sans restrictions pour le langage qu’il a tenu, il y a quelques jours, à la Chambre à propos des délégués administratifs. L’institution de ces délégués a été, sinon la