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Il faut lire et méditer la préface anonyme, écrite ou tout au moins inspirée par Lennig, dont est précédé le compte rendu de cette assemblée de Mayence. Elle donne à proprement parler le secret des futures victoires catholiques ; elle mérite d’être retenue comme l’un de ces documens historiques qui déterminent toute une histoire en même temps qu’ils la résument. On pouvait craindre que les catholiques allemands ne se laissassent obséder, exclusivement, par l’idée des libertés conquises ou des libertés à conquérir, et que, confisqués par cette pensée, ils ne parussent affecter à l’endroit de leurs concitoyens une attitude constante d’assaillans ; quelque temps durant, le succès aurait pu les récompenser, mais les représailles ensuite auraient surgi ; et en donnant à la religion catholique l’apparence d’être une sorte d’émigrée de l’intérieur, ils auraient pu lui faire perdre les sympathies de la foule. C’est une action purement négative que celle qui vise, simplement, à prendre ou à surprendre quelque liberté nouvelle : la liberté ne vaut que par l’emploi qu’on en fait ; elle est un moyen, non un but ; et c’était en 1848 une erreur fréquente, de parler et d’agir comme si elle pouvait être la cause finale de toute une politique. Les catholiques allemands surent échapper à cette erreur.


Les associations catholiques, dit la préface, s’étaient avant tout proposé, comme but, d’obtenir et de garantir la liberté de l’Église et de l’éducation. Mais pourquoi la liberté de l’Église, sinon pour lui procurer la possibilité de mettre en vigueur, dans tous les domaines de la vie, les principes du christianisme ? Et inversement, comment la liberté de la religion et de l’Église se peut-elle maintenir, en face des forces hostiles, si elle ne peut pas s’appuyer, dans le peuple, sur une opinion catholique puissante, sur des mœurs catholiques ? L’association ne peut pas se borner au but purement négatif de la liberté juridique de l’Eglise et de l’éducation ; elle doit au contraire, et d’une façon tout aussi essentielle, aviser à réveiller, vivifier et répandre l’opinion chrétienne et les mœurs chrétiennes, à implanter les principes catholiques dans l’ensemble de la vie, et à résoudre le grand problème du temps présent, la question sociale.


Voilà une définition, admirablement exacte et rigoureuse si l’on songe à l’année où elle fut écrite, des rapports entre l’action catholique et l’idée de liberté, et du caractère positif, nous dirions volontiers constructeur, qu’allait affecter l’énergie allemande. On y voit les préoccupations « catholiques sociales » succéder, tout de suite, aux revendications en faveur de la liberté