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ment de la nuit, reproduisaient près de son lit des airs se rattachant, par un lien quelconque, aux personnes qu’il voulait évoquer dans ses rêves.

Chez l’homme éveillé, on peut aussi saisir la preuve de l’existence de ces impressions qui vont aux centres psychiques inférieurs, ne les dépassent pas, mais se traduisent par des mouvemens automatiques et inconsciens souvent compliqués.

Ainsi, vous marchez sur un trottoir, en causant avec animation, l’esprit très occupé par une pensée qui vous absorbe : automatiquement, vous marchez, vous évitez les obstacles, si la pluie commence à tomber, vous ouvrez votre parapluie, en faisant tous les mouvemens, souvent compliqués, nécessaires pour ne pas accrocher les parapluies des passans ; vous vous garez des flaques d’eau et des éclaboussures des chevaux ; si vous rencontrez une dame, vous descendez du trottoir ; vous pouvez même la reconnaître et la saluer… Et, pendant tout ce temps, vous continuez à suivre votre idée première ; votre centre O reste absolument étranger à tout ce que vous sentez et à tout ce que vous faites : rentré chez vous, vous serez incapable de dire s’il a plu ou non et qui vous avez rencontré.

Donc, comme le disait déjà Gerdy en 1846, « il faut s’habituer à comprendre qu’il peut y avoir sensation sans perception de la sensation. » Ce sont les sensations du psychisme inférieur, perçues uniquement par le polygone, et ne se révélant que par les mouvemens automatiques qui les utilisent.

Ceci permet de comprendre les bizarreries que présentent certains malades.

Les hystériques ont souvent des parties de leur corps devenues insensibles, anesthésiées. Si une malade de ce genre a une anesthésie complète des deux membres supérieurs (mains et doigts compris) elle ne sentira, dans ces régions, aucune piqûre même profonde. Et cependant, avec ces mains insensibles, elle boutonnera ou déboutonnera sa robe les yeux fermés, elle se coiffera, plaçant adroitement dans ses cheveux des épingles qu’elle ne voit pas et qu’elle ne sent pas.

Bien des personnes verraient là des preuves de simulation. Il n’en est rien.

Le sujet ne sent pas les objets, en ce sens que l’impression partie du contact de ces objets n’arrive pas jusqu’à ses centres supérieurs et consciens. Mais cette impression faite sur la peau