Piso, dont Salluste dit « qu’il était d’une audace extrême, accoutumé à l’intrigue, ruiné, et que sa détresse autant que sa perversité l’excitaient à bouleverser la république. » On se mit vite d’accord sur ce qu’il y avait à faire. On convint de tuer les deux consuls désignés, Cotta et Torqualus, et de mettre Autronius et Catilina à leur place[1]. Tout avait été minutieusement préparé, et le succès paraissait si certain, qu’on s’était procuré d’avance des licteurs pour l’installation des nouveaux magistrats. L’affaire, qui avait été d’abord fixée aux nones de décembre, fut ébruitée, et l’autorité prit des précautions. Elle fut alors remise aux calendes de janvier ; mais cette fois, il ne s’agissait plus seulement de tuer les consuls, on devait y joindre une partie des sénateurs, quelques-uns disent même le Sénat tout entier. Catilina s’était réservé de donner le signal du massacre. A-t-il eu le tort, comme on l’a dit, de se trop presser, ou faut-il croire que les conjurés, qui manquaient un peu de zèle, s’étaient mis en retard ? ce qui est sûr, c’est que lorsque vint le moment d’agir, ils ne se trouvaient pas à leur place. Après ce second échec, le coup était définitivement manqué.
Voilà ce qu’on a plus tard appelé la première conjuration de Catilina ; on voit bien qu’elle différait entièrement de l’autre. D’abord, il n’est pas sûr qu’il y ait joué le premier rôle ; il a des complices, Autronius, Pison, qui semblent avoir au moins autant d’importance que lui, tandis que, dans la conjuration véritable, non seulement il est le premier, mais on peut presque dire qu’il est seul, tant les autres sont effacés et paraissent médiocres. Ensuite, le complot ayant échoué avant d’être mis véritablement à exécution ne fut connu que d’une manière très imparfaite. Beaucoup de bruits coururent que, même à cette époque, il ne fut pas possible de vérifier. Asconius laisse entendre, d’après Cicéron, que plusieurs personnages importans en étaient, qui ne voulaient pas être connus. Suétone est plus précis ; il affirme que César et Crassus favorisaient l’entreprise, et que, si elle avait réussi, Crassus aurait été nommé dictateur et César maître de la cavalerie. C’étaient évidemment des bruits fort répandus à Rome ;
- ↑ Il y a ici quelques contradictions. Suétone prétend que ceux auxquels on voulait rendre les faisceaux étaient les deux consuls qui avaient été destitués, Autronius et Sylla. Mais Salluste et Asconius remplacent Sylla par Catilina. Cicéron affirme que Sylla, après sa mésaventure, se tint sur la réserve. Il s’était retiré à Naples, qui est un lieu plus fait pour le plaisir que pour les complots. Il est naturel qu’Autronius, que Sylla avait abandonné, l’ait remplacé par Catilina.