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côté Chopin, qu’elle fit racheter sous main une partie du mobilier ; et sûrement elle en fit ensuite présent au ménage, puisque nous voyons ce mobilier réclamé, à coups d’exploits d’huissier, par Solange à son mari, en l’année 1854. Elle fit plus. Très vite, peut-être dès 1849, elle servit volontairement à sa fille une rente mensuelle qu’elle lui compta avec une ponctualité de notaire[1]. Et cela, toute sa vie. Même lorsque Solange, dégagée du mariage et « lancée, » vivait avec toutes les apparences de la richesse, George Sand ne cessa jamais, par principe, de prélever tous les ans une somme fixe sur le produit de sa plume, pour les consacrer aux « besoins éventuels » de sa fille[2]. C’est dire quelle erreur commettent ceux qui, de bonne foi, ont touché à ces délicates questions. Nous n’y touchons nous-même que pour remettre les choses à leur vrai point.


VII

Reste l’incident Chopin.

Il est oiseux, sans doute, d’exprimer ici la profonde pitié que nous inspire la fin du douloureux artiste, mort victime de l’art et de sa fièvre presque autant que de sa maladie. Qui ne serait ému de son isolement, de ses souffrances physiques, — il étouffait, — de ses angoisses morales, de ses affres religieuses, enfin du long martyre qu’il traîna jusqu’à la fin de leçon en concert, de Paris à Londres et de Londres à Paris, parmi les frissons, la toux, l’insomnie et l’hallucination ? Chopin malade, Chopin mourant attendrira toujours les cœurs aimans, comme sa musique trempée de larmes éveillera toujours un navrant écho dans les âmes blessées. Mais quoi ! S’il lassa lui-même la main qui lui fut si longtemps bienfaisante, et s’il la contraignit à se retirer de lui, n’imputerons-nous qu’à George Sand un dénouement que, sans doute, elle n’eût pu conjurer ? L’injustice serait par trop flagrante. Il y a les droits de la pitié certes ; il y a aussi ceux de la vérité.

Mainte légende a couru sur cette célèbre rupture, et nous n’en connaissons aucune de véridique. Hier, les lettres de Chopin à sa famille ont fait entrevoir, sinon la raison profonde, du

  1. Lettre de décembre 1848, à M. Simonnet père (inédite).
  2. Lettres manuscrites de Solange à sa mère. Lettres inédites à Dumas, année 1862, etc. Cette rente fut, au début, de 1800 francs ; bientôt après, de 3 000 francs.