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En ce qui touche l’Eglise et le mouvement scientifique, il avait émis la pensée, dès 1828, que, parmi les armes auxquelles le clergé pouvait avoir recours pour reconquérir l’opinion, il y en avait deux qui seraient particulièrement efficaces : l’instruction et l’indépendance. L’ascendant de l’Église ayant tenu jadis, en très grande partie, à ce qu’elle portait le sceptre de la science, ne fallait-il pas qu’elle le reprît en main pour retrouver son prestige, et qu’elle initiât le jeune clergé aux sciences modernes, aux choses applicables dans le siècle où il vit, dans le monde sur lequel il doit agir ? Montalembert était si pénétré de cette pensée qu’il n’hésitait pas à écrire que : « craindre la science dans l’intérêt prétendu de la religion, ce serait douter de la vérité. » Or, depuis la création de l’École des Hautes Études des Carmes à Paris, quels progrès ! La fondation des Instituts catholiques, si elle a été la plus importante manifestation de ce grand mouvement, est loin d’en être demeurée la seule. L’organisation des congrès internationaux de savans catholiques par Mgr d’Hulst a bientôt suivi ; et l’on n’a pas oublié avec quel éclat a été tenu à Munich le plus récent de ces congrès. Mais surtout, quelle émulation dans le clergé pour conquérir les grades universitaires, voire les plus élevés, et de quelle autorité jouissent dans toutes les branches, dans toutes les directions, ceux de ses membres auxquels les Académies ont ouvert leurs portes, ou, tout au moins rendu hommage ! Et de quels encouragemens ces progrès n’ont-ils pas été l’objet de la part de Léon XIII ! On n’a pas oublié le vœu si fortement exprimé dans les Encycliques : « que les études du clergé s’harmonisent avec les progrès et les conquêtes de la raison, de la science moderne, que la science dans le clergé rayonne, s’affirme, renverse les fausses idoles élevées par les faux savans, pour saisir la masse des esprits et la conduire à la vérité. » Aucun esprit impartial ne saurait contester l’importance du mouvement qui s’est produit à la suite de tels encouragemens. Une revue[1], qui ne peut être suspecte de flatterie envers l’Eglise, reconnaissait, hier à, peine, « qu’il ne pouvait plus être question de l’attaquer aujourd’hui avec les misérables chicanes d’une érudition plus brillante que sûre ; que la science catholique a fait ses preuves, et qu’elle n’a à redouter aucun progrès, aucune recherche historique ou autre. »

  1. Revue de Métaphysique et de Morale.