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propriétés, en définitive, sont imposées chez nous sur leur revenu, quoique l’impôt ne porte pas ce nom !

La propriété, en Prusse, est donc actuellement plus favorisée qu’en France, notablement moins imposée ; mais combien notre situation ne serait-elle pas aggravée si on venait encore superposer aux impôts existans un nouvel impôt sur le revenu ?

Il frapperait en effet la propriété française, par rapport à la propriété prussienne, d’une surtaxe immédiate représentant une cinquantaine d’années accumulées d’Einkommensteuer ! Voilà bien les « réformes » des thaumaturges parlementaires !

Ces différences suffiraient à elles seules pour montrer que l’on ne saurait tirer argument du système prussien pour le justifier en France : la comparaison des deux États au point de vue constitutionnel et politique en fait apparaître de bien plus profondes. Par notre système électoral, dont le suffrage universel pur est le grand ressort, par le mécanisme intérieur de nos projets d’impôt sur le revenu tendant à affranchir de l’impôt la majorité des électeurs, il se trouverait que l’impôt serait fixé, décrété par ceux qui ne le payeraient pas, au lieu d’être « consenti » par ceux qui le payent, suivant le principe essentiel du droit moderne.

En Prusse, les choses vont bien différemment ! Plus on y paye d’impôt sur le revenu, plus on y possède de suffrages. Le droit électoral, au lieu d’y être en raison in verso des charges fiscales, s’y trouve mesuré par elles. Plus on est contribuable, plus on est électeur. C’est l’inverse de la « réforme » socialiste, dont l’objet avoué est de détruire la propriété individuelle, le capital, et dont le résultat serait de livrer pieds et poings liés les payeurs de l’impôt à l’arbitraire des non-payeurs rendus les plus nombreux, et souverains par la loi du suffrage universel et du régime majoritaire.

Le système électoral prussien repose sur la Constitution du 31 janvier 1850, sur l’ordonnance royale du 30 mai 1859, et sur la loi du 29 juin 1893. En vertu de ces textes, les membres de la Chambre des députés, le Landtag, sont nommés au second degré. Les électeurs du second degré, ceux qui font l’élection des députés et qui sont appelés Wahlmann (hommes votans) sont eux-mêmes élus par les électeurs primaires (Urwähler) dans les conditions suivantes.

Etant donné une circonscription électorale nommant un