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LES LIVRES D’ÉTRENNES

Si l’on jette un coup d’œil d’ensemble sur tous ces volumes aux couleurs étincelantes qui brillent dans l’abondante moisson de la fin de l’année, on constate que c’est à la grandeur de la France, à son héroïsme, à sa foi, à ses arts, à sa littérature, à son esprit de conquête et de civilisation, de justice et de protection, à son histoire, à tout ce qui l’a faite ce qu’elle fut et ce qu’elle est, que sont consacrés la plupart de ces livres destinés à la jeunesse. De tout ce passé incomparable, sorti du travail des siècles, il n’en est guère qui ne fournisse le témoignage, qui n’apporte l’écho et, tandis que notre pays est aujourd’hui traité comme s’il n’était pas formé de traditions, à l’heure même où l’on s’efforce de rompre tout ce qui nous y rattache, de le renier, c’est, avant tout, faire œuvre utile que de les lui rappeler dans toutes les manifestations de la pensée. Entre les plus célèbres qui nous soient restées d’autrefois, les Très Riches Heures du duc de Berry[1], où revit la France des premiers Valois, de la fin du XIVe et du commencement du XVe siècle, peuvent être considérées comme un monument capital pour l’histoire de la peinture au moyen âge : elles constituent, parmi les manuscrits à miniatures, un document d’une valeur exceptionnelle pour celle de l’art français. La plupart, exécutées pour le fameux Duc Jean de Berry, qui, comme bien des condottieri italiens du même temps, a laissé la réputation d’un prince aussi perfide et cruel que passionne des belles choses, offrent le plus parfait chef-d’œuvre de cet art de l’enluminure qui a joué un rôle considérable pendant des siècles avant et depuis les écoles de Paris et de Bologne

  1. Plon, Nourrit et Cie.