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POÉSIE

« Je suis, tout en flattant ma chatte « Gibelotte, »
Hanté pur une idée obsédante et falote.
Ma chatte « Gibelotte » a ce je ne sais quoi
Qui des clercs et des chats est un même apanage ;
Ensemble nous faisons le plus parfait ménage,
Moyennant qu’elle garde, entier, son quant-à-soi.
Elle est souple, discrète et point du tout méchante,
Sauf à n’avoir souci que de ce qui lui chante ;
De plus, et sans qu’il faille en chercher la raison,
Elle appartient bien moins à moi qu’à la maison.
C’est la règle, d’ailleurs, ni flatteuse, ni neuve.
Vous doutez ? A ceci n’auriez-vous point songé
Que nul avec un chat n’a jamais voyagé,
Et n'est-ce pas du fait administrer la preuve ?
Whittington ? Oui, je sais ; mais il n’alla pas loin ;
La bête eût suppléé les cloches au besoin.
L’état d’âme des chats reste une énigme obscure ;
Avec eux, on n’est sûr de rien, on ne sait pas :
L’ami du fabuleux marquis de Carabas
Est le seul chat connu qui d’un homme ait eu cure.
Moi, j’adore ma chatte ; elle, de son côté,
Se laisse aimer ; telle est, au vrai, la vérité.
De plaisanter à froid honni qui me soupçonne,
Mais c’est une très fine et soigneuse personne