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en pénétrer à fond les ressources et les lois : car son père nous rapporte que, un mois après, à Heidelberg, les autorités de l’église du Saint-Esprit, l’ayant entendu improviser sur l’orgue de cette église, résolurent de faire graver une plaque commémorative, pour célébrer le miracle où elles venaient d’assister.

Ses progrès sur le violon, comme je l’ai dit, n’avaient pas été moins rapides, ni moins étonnans. Au château de Nymphenbourg, le 13 juillet, en présence de l’électeur de Bavière Maximilien-Joseph, il exécuta (ou peut-être déchiffra) un concerto de violon, avec une entrée et des cadences de sa fantaisie. L’excellent électeur, — qu’on voie, au Musée de Versailles, sa rouge et souriante figure de brave homme ! — paraît d’ailleurs avoir été émerveillé, en toute façon, du génie de l’enfant ; et je crois bien que, de tous les princes qu’avaient rencontrés déjà les Mozart ou qu’ils allaient rencontrer dans la suite de leur voyage, aucun ne s’est plus sincèrement intéressé à eux. Après avoir entendu Wolfgang à Nymphenbourg, — où le parc, avec ses bosquets et ses pièces d’eau, dût être pour le petit un enchantement sans pareil, — il l’invita à une « musique de table, » donnée, le 18 juillet, dans son palais de Munich, l’endroit le plus riche du monde en menus et délicieux objets de curiosité. Durant le repas, Maximilien-Joseph s’entretint familièrement avec Léopold Mozart, le questionna sur lui-même et sur ses enfans, lui témoigna son regret de n’avoir pas encore entendu le jeu de Marianne. Il entendit jouer la jeune fille, quelques jours plus tard, la complimenta chaudement ainsi que son frère ; et, pour leur marquer sa satisfaction, il fit remettre à leur père la respectable somme de cent florins, à laquelle l’archiduc Clément, son frère, voulut joindre, pour sa part, un autre cadeau de 75 florins. Cette fois comme toujours, Mozart put emporter de Munich un souvenir charmant.

Le 22 juin, les voyageurs arrivèrent à Augsbourg. C’était la ville natale de Léopold Mozart ; et celui-ci y avait encore sa vieille mère, deux frères, nombre de neveux et nièces à peu près du même âge que ses propres enfans. Mais il ne semble pas s’être beaucoup soucié d’entrer en rapports intimes avec tous ces membres de sa famille. Il n’en dit pas un seul mot, dans ses lettres à Hagenauer. Il y dit seulement que, au cours de tout son voyage, « il n’a eu de commerce qu’avec la noblesse et les personnes de distinction ; » et certes ses deux frères, qui tous