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qui a commencé d’être connue, il y a vingt ou trente ans, et dont l’étude se poursuit tous les jours sous nos yeux.

Le type de ces nains est classique. Il nous a été conservé par les peintres italiens et espagnols du XVIe siècle et du commencement du XVIIe, Raphaël, Veronèse, Tiepolo, le Dominiquin et Velasquez. Velasquez a représenté les types qu’il avait sous les yeux avec une sincérité parfaite et un réalisme saisissant. Il existe au musée du Prado, à Madrid, de la main de Velasquez, sept portraits de nains célèbres. Dans leur ouvrage sur « les difformes et les malades dans l’art, » Charcot et Richer en ont reproduit la gravure. Le docteur Porak en a intercalé deux dans son mémoire sur l’Achondroplasie. Il ne peut y avoir, en effet, de meilleure illustration de la maladie, ou, si l’on veut, de la difformité achondroplasique. Le nain « el primo, « par exemple, est représenté assis sur le sol. Ce qui frappe immédiatement le spectateur, c’est sa tête volumineuse, sa voûte crânienne épanouie surtout en avant, du côté du front. Le torse régulier et largement développé est celui d’un homme vigoureux. Mais, après le front, le second objet qui retient l’attention, ce sont les bras, tellement courts qu’ils arrivent à peine à la taille. Ce sont enfin les jambes dont la brièveté ressort d’une manière non moins saisissante. À ces traits, le médecin ne saurait méconnaître l’achondroplase. Un tronc vigoureux, sur lequel s’attachent des membres robustes, mais invraisemblablement courts, surmonté d’une tête volumineuse, voilà en deux mots la caractéristique de cette difformité. Si l’on avait le loisir d’examiner le sujet vivant sous toutes ses faces, l’observateur apercevrait un dernier trait qui complète le signalement, c’est l’ensellure profonde de l’échine. Le dos est fortement creusé au niveau des reins, comme si le tronc trop lourd avait basculé en avant sur le bassin. Cette disposition qui accentue la saillie du ventre d’un côté, et celle des épaules de l’autre, en arrière, donne au torse une ressemblance avec celui du polichinelle à deux bosses.

Il y a, dans l’art ancien, d’autres représentations très réalistes de la même monstruosité. Les Egyptiens semblent l’avoir divinisée sous les noms du dieu Bès et du dieu Ptah, le premier présidant aux armes et à la toilette et le second aux inhumations. On en voit da nombreuses figures au Musée des antiquités égyptiennes, au Louvre. Les traits sont, encore ici, les traits connus, caractéristiques : une tête volumineuse dans sa partie crânienne, des membres robustes mais extrêmement courts, une cambrure des reins poussée jusqu’à l’ensellure.