mais quand elle trouve, pour s’exprimer et s’apaiser, les ressources de la poésie, on ne pense qu’à sa beauté : les poésies d’Ada Negri sont dans toutes les mains, et il y a des gens fort paisibles et résignés, qui les admirent.
Le titre de son nouveau volume en indique le thème principal : ce sera la maternité.
Dans l’esprit d’Ada Negri, ce mot prend un sens très large : il ne s’agit pas seulement des sentimens qu’une mère peut traverser, dès avant la naissance du petit être qu’elle sent tressaillir, ni même, d’une façon déjà plus générale, de ceux qui sont communs à toutes les femmes et dont tous les enfans sont les objets. Il s’agit du « grand mystère, qui ouvre les sources de la vie[1], » du rapport indissoluble qui unit les choses créées à la force créatrice, de tout ce qu’il y a de maternel dans le monde et dans l’espace. Tantôt, c’est la Terre qui se plaint d’être abandonnée, rappelle ses fils, leur promet ses joies, invite le poète à recevoir la révélation de ses secrets :
- Inclinés sur mon cœur
- Au rythme innombrable, ils sauront
- La vérité que Dieu, sur le bas mensonge
- Des hommes et (sur) l’erreur
- A posée. — Et de mon puissant
- Sein gonflé de germes et de douleur
- Jaillira par ces bouches en fleurs
- Le courant magique
- De vie[2]…
Tantôt c’est le chœur lamentable des mères malheureuses, dont les voix lointaines, inconnues, confuses, apportent à la poétesse des plaintes qu’elle recueille et note avec une sombre éloquence, d’autant plus saisissante qu’elle est directe et n’emprunte sa force qu’aux faits :
- … Nous avons conçu sans joie le fils
- Qui brille dans les rêves comme brille un lys.
- Nous avons porté dans notre sein la créature
- Avec fatigue, avec faim et avec peur.
- Dans les mansardes où l’air manque,
- Dans les régions infectées de malaria,
- Dans les champs où passe, horrible déesse,
- La pellagre aux yeux de folie,