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LA POLITIQUE
DE
L’UNITÉ MORALE

S’il est vrai qu’on doive juger un gouvernement surtout d’après ses actes, il ne l’est pas moins que la valeur même de ces actes dépend en partie des principes qui les ont dictés. Aussi avons-nous vu chacun des ministères qui, en ces derniers temps, se sont succédé au gouvernement de la France, inscrire en tête de son programme quelque formule reluisante, destinée à légitimer par avance celles de ses mesures qu’il savait être le moins fondées en droit, ou le moins excusables. Le ministère du 22 juin 1899 s’était défini lui-même le « Ministère de la Défense Républicaine ; » le Ministère du 7 juin 1902 s’était donné pour être le « Ministère de l’Action Républicaine. » Au cours de la dernière année, le brevet qu’il s’était décerné lui a paru, sans doute, incomplet et cette ambition insuffisante : il est aujourd’hui devenu le ministère de « l’Unité Morale. » Sous cette égide se groupent ceux qui combattent « les élémens disparates qui finiront par détruire l’unité morale de la nation, » comme s’exprimait M. Combes à la Chambre des Députés, le 18 mars 1903. Et c’est la thèse sur laquelle le rapporteur de la commission des Congrégations a édifié son réquisitoire, lorsqu’il nous a dit « vouloir rendre à notre pays cette belle unité morale qui, dans les temps passés, a fait sa gloire et rendu son histoire illustre entre toutes. »

Nul peuple n’est plus que le nôtre sensible à la chanson