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L’ALLEMAGNE CATHOLIQUE
ENTRE 1800 ET 1848

III[1]
LES PUBLICISTES CATHOLIQUES ET LA SAINTE-ALLIANCE

C’est une opinion commune qu’entre 1815 et 1830, deux forces et deux idées se disputèrent l’Europe : d’une part, les rois et l’Église, d’autre part les peuples et la Révolution. La réalité fut plus complexe, les couleurs des drapeaux furent plus nuancées. Ni le catholicisme, à cette date, ne s’enrôla servilement dans le bataillon des rois, ni les rois ne se groupèrent sous la bannière catholique ; et c’est en s’appuyant sur des théories préconçues plutôt que sur les faits, que l’on établit entre la Sainte-Alliance et l’Église une étroite solidarité. La Sainte-Alliance, par-là même qu’elle ignorait ou qu’elle estompait les diverses nuances séparant entre elles les confessions chrétiennes, ratifiait en fait, toute sainte qu’elle fût, cette laïcisation des maximes diplomatiques, contre laquelle Rome avait protesté au moment des traités de Westphalie ; et parce que suinte, sans doute, elle ne redoutait pas de sanctifier, au regard de l’immuable unité catholique, des façons diverses d’être chrétien : la façon du Tsar, la façon du roi de Prusse. Championne théorique

  1. Voyez la Revue des 15 juillet 1903, 15 janvier 1904.