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précipita la crise ministérielle. A la surprise générale, le Roi chargea Hansemann de constituer un nouveau cabinet : ce n’est pas qu’il eût de la sympathie personnelle à son égard, mais il le considérait comme un adversaire déterminé de l’anarchie, comme le seul qui ne se fût pas découragé, qui ne fût pas dégoûté par les ennuis du pouvoir, enfin comme un homme populaire. Frédéric-Guillaume indiquait comme collègues Schreckenstein, Schleinitz, qui faisaient partie du cabinet, et Auerswald, frère d’un des ministres démissionnaires. Ce fut un changement de personnes plus que de principes. Hansemann essaya de se renforcer, en complétant le ministère par l’adjonction de membres du parlement, à l’exception de la gauche. Ce n’était pas commode. Hansemann réussit à gagner Kuhlwetter, Milde, Rodbertus et Garke. C’était un ministère de compromis, hâtivement mis sur pied. Le programme ministériel annonça le dépôt de divers projets de loi (garde nationale, rachat des charges rurales, organisation communale, etc.) ; sur le terrain économique et financier, il se référa au programme du cabinet précédent. Une phrase vague et diplomatique constatait l’évolution faite en Prusse depuis le mois de mars, sur le terrain constitutionnel.

Au bout de huit jours, le cabinet, qui s’était divisé en deux camps, l’un de droite, l’autre de gauche, perdit l’un de ses membres : le rural Rodbertus, ministre de l’Instruction publique, donna sa démission. C’était d’ailleurs une idée assez étrange d’avoir choisi Rodbertus, avec lequel on se trouvait en désaccord sur presque toutes les questions. Kuhlwetter se montra plein d’énergie pour rétablir l’ordre dans la rue, l’effectif des sergens de ville fut porté à 2 000 hommes. Les mesures financières prises par Hansemann commençaient à porter leurs fruits ; la confiance renaissait ; le gouvernement fit reprendre les travaux de chemins de fer. Un projet de loi réformant l’administration locale fut déposé, un autre supprimant le droit de chasse sur les terres d’autrui, un troisième abolissant l’exemption de l’impôt foncier. La situation financière était difficile : Hansemann prévoyait pour l’exercice en cours une plus-value de dépenses de 22 millions, une moins-value de recettes de 8 millions, soit un déficit de 30 millions. Les rapports des agens à l’étranger montraient qu’il était impossible de songer à faire appel au crédit sur les places étrangères. L’emprunt 5 pour 100, émis le 25 avril, avait donné 1 million et demi. Hansemann. à