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Il naquit en 1790, dans le presbytère de Fenkenverder (électoral de Hanovre), fils d’un pauvre pasteur protestant. Ses parens avaient un grand mépris pour l’argent ; généreux, charitables, ils traversèrent la vie dans un état voisin de la gêne ; David Hansemann adoucit l’existence de sa mère, dès qu’il fut en mesure de le faire. Il fréquenta l’école du village, reçut les leçons de son père et de son frère aîné, n’alla dans aucune université, mais, à quatorze ans, on l’envoya apprendre le commerce dans la petite ville de Rheda. Son chef était à la fois négociant et maire de la localité : l’apprenti servit donc également de secrétaire au maire, qu’il aidait dans sa correspondance en français, avec le préfet du département et dans l’établissement des rôles des contributions. Le futur ministre des Finances eut l’occasion de saisir sur le vif le fonctionnement des rouages inférieurs de l’administration. A Rheda, il put aussi compléter en partie son instruction, grâce à son frère Charles, qui était précepteur dans la famille du comte Bentheim-Tecklenburg. Les deux frères travaillaient ensemble de quatre à six heures du matin, la journée étant prise par leurs occupations professionnelles. David Hansemann recevait une trentaine de thalers de sa famille, son patron lui donnait comme étrennes un louis d’or ; il y ajoutait les bénéfices d’un petit commerce en plumes d’acier, qui étaient une rareté au début du siècle. En 1809, après avoir fait quelques économies modestes, et pourvu d’un certificat attestant qu’il avait servi avec fidélité et avec zèle, qu’il connaissait l’anglais, le français et qu’il comprenait l’italien, il se mit en quête d’une autre situation. Il entra comme commis et voyageur dans la fabrique de drap de J. H. Elbers, à Montjoie ; nourri et logé, il recevait 250 thalers d’appointement. L’engagement, conclu pour quatre ans, dura de 1810 jusqu’en 1815. David Hansemann, qui s’était fait de nombreux amis et qui avait acquis une véritable compétence dans quelques articles, comme la laine, la garance, les huiles et les bois de teinture, ouvrit une maison de commission en septembre 1817, à Aix-la-Chapelle.

La province du Rhin avait traversé sous la domination française une période de prospérité matérielle, que troubla son incorporation dans la monarchie prussienne ; l’industrie et le commerce perdirent une partie des débouchés que le régime napoléonien leur avait assurés en Europe et il en résulta une crise prolongée. Les sympathies pour la Prusse s’en ressentaient,