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piqués, mais c’est égal), en un mot il a juré comme un templier… « Je savais bien que le b… était un pitoyable poète, mais je ne savais pas qu’il fût encore… » Il a contre lui un vers à cœur dans le Chant du sacre :


Le fils a racheté les crimes de son père,


ce qui a été changé en :


Le fils a racheté les armes de son père[1].


Faites de tout ceci ce que vous voudrez, mais je vous dis mes impressions en fidèle correspondant de la Gazette d’Augsbourg[2].

Tout ceci est, je m’aperçois, pour vous plus que pour Mme Olivier, à qui je n’ai que le temps de baiser les mains.

A vous, cher Olivier, et aux vôtres.


Ce 5 mai 1842.

Mon cher Olivier,

J’ai eu de mauvaises nouvelles, que Lèbre a dû vous transmettre. Bonnaire avait lu une quarantaine de pages lundi ; son avis était formé, mais il voulait continuer. Il a, en effet, achevé et m’a écrit, deux ou trois jours après, une lettre assez motivée à sa manière, dont Lèbre a dû vous transmettre la substance. De Mars a été grondé et son jugement cassé. Tout ce que j’avais pris de précautions a tourné contre la réussite. J’avais pensé que, de tous les lecteurs du bureau de la Revue (et le résultat l’a prouvé), De Mars était le mieux disposé à recueillir une œuvre intime et élevée. J’avais eu vent depuis qu’avec cet avis préalable et les petits changemens qui lui paraîtraient indispensables, on pourrait emporter l’affaire près de Bonnaire, qui tient à ne pas me désobliger. Tout cela, je le crois encore, se serait passé de la sorte, si la longueur de l’article n’avait fait que Bonnaire a voulu y regarder à deux ou trois fois. Cette longueur que je n’avais pas prévue, et qui a remis tout en question, est une chose

  1. Ce n’est pas le seul changement qui ait été fait dans le Chant du Sacre. On n’a pour s’en rendre compte qu’à se reporter au Manuel de l’amateur des livres au XIXe siècle, par Georges Vicaire.
  2. L’idée n’est encore venue à personne de recueillir les articles que Sainte-Beuve envoya pendant quelques années à cette vénérable gazette : il y en a pourtant de bien intéressans.