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nombre même de ces unités. Cette vérité est si claire qu’on s’étonne d’avoir à la défendre.

Jusqu’alors, nous avons toujours fait l’absurde raisonnement suivant : l’Allemagne a tant de régimens, tant de bataillons, tant de compagnies ; pour n’être pas plus faible qu’elle, ayons aussi tant de régimens, tant de bataillons, tant de compagnies. Créons les cadres que nous remplirons ensuite comme nous pourrons.

Or c’est précisément le contraire qu’il faudrait dire. Le service de deux ans ne nous donnera plus qu’une moyenne de tant d’hommes valides à incorporer, avec ce chiffre nous pouvons avoir tant de bataillons, tant de compagnies à l’effectif minimum nécessaire, 100 hommes par exemple. N’ayons donc que le nombre de compagnies que nous pouvons avoir. Cessons de jouer vis-à-vis de l’Allemagne le rôle de la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf. Ayons toutes les unités que notre effectif disponible nous permettra d’entretenir sur un pied suffisant, mais pas une de plus.

Cela sera certainement pénible à l’amour-propre national et cela peut être regrettable pour le prestige de la France, mais c’est une nécessité qui s’impose. Puisque, quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, le service de deux ans doit amener une diminution de l’effectif de l’infanterie, il est indispensable que cette diminution ne porte pas sur l’effectif de ses unités, qui est déjà réduit au minimum indispensable à l’instruction, — mais bien sur le nombre même de ces unités. Au moins celles qui resteront seront solides, bien instruites, et présenteront une réelle valeur militaire.

Mais, dira-t-on, si on diminue en temps de paix le nombre de nos unités, — pour en assurer l’instruction solide, — lorsque viendra la mobilisation, le nombre des réservistes disponibles n’ayant pas diminué de son côté, nous n’aurons plus les cadres nécessaires pour les recevoir. Il faudra les laisser en arrière comme forces de remplacement ; ce sont des hommes instruits et solides qui nous manqueront au moment le plus important : celui des premiers engagements. Il y a là une cause d’affaiblissement considérable.

On pourrait répondre à cela qu’en effet c’est un affaiblissement, mais que mieux vaut encore un affaiblissement partiel, résultant d’une diminution numérique des combattans, qu’un