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Au premier abord, il semble bien qu’il soit impossible d’obtenir avec deux classes le même effectif qu’avec trois. Cela a toutes les apparences d’une vérité de M. de La Palice. On aura beau supprimer toutes les dispenses jusqu’à rendre la loi, non seulement funeste à toutes les carrières, mais véritablement inhumaine ; on aura beau inscrire tous les malingres dans les services accessoires, comme si la vigueur physique était moins nécessaire à un infirmier ou à un ouvrier d’administration qu’à un homme de troupe ; on aura beau triturer les chiffres et les retourner en tous sens, il ne paraît pas possible de faire que deux classes en valent trois. Il est vrai que les défenseurs du service de deux ans répondent : Si l’effectif de paix est diminué, le nombre des hommes, disponibles en temps de guerre reste le même, et ces réservistes seront meilleurs, car ils auront tous deux ans de service, tandis qu’aujourd’hui bon nombre d’entre eux n’en ont qu’un. La troupe mobilisée sera plus forte avec le service de deux ans qu’avec le service de trois ans.

C’est là un dangereux sophisme. La valeur d’une troupe, — toutes choses égales d’ailleurs, — dépend de l’instruction plus ou moins complète de ses « unités de combat. » L’unité de combat constitue donc aussi l’unité d’instruction. Dans l’infanterie c’est la compagnie. La compagnie mobilisée comporte un effectif d’environ 250 hommes, cadres compris. Avec le service de trois ans, cette unité de combat était composée d’hommes de trois classes de l’armée active et de trois classes de réservistes dont un quart environ n’avaient servi qu’un an. Avec le service de deux ans, la même unité ne comprendra plus que deux classes de l’armée active, et quatre classes de réservistes, ayant, pour la plupart, il est vrai, fait deux ans. Entre ces deux unités il ne saurait y avoir de comparaison, pour la valeur de l’instruction militaire. Pour qu’il en lut autrement, il faudrait que ces réservistes eussent reçu, pendant leur deux années de service, une instruction militaire plus solide et plus complète que ne la reçoivent actuellement nos hommes de trois ans. Or, avec la