Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 22.djvu/333

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

été soulever l’opinion en France, rendre la guerre populaire, réunir Napoléon et le peuple français, et rompre les plus habiles et les plus efficaces des combinaisons de sa diplomatie. Il endoctrina Nesselrode ; il fit, le 24 juin, à l’empereur François un rapport qui leva les dernières hésitations de ce souverain. Par voie de conséquence, il pressa l’accession de Bernadotte, et ses mouvemens. « J’avoue que je compte prodigieusement sur l’effet de sa coopération[1]. » Effet militaire d’abord, effet politique surtout. Puis, convaincu, sinon d’abuser, au moins de dérouter Napoléon, il obtint de François cette déclaration : « La guerre une fois commencée, les trois cours alliées poseront pour but de leurs efforts communs les articles énoncés par les cabinets russe et prussien dans leurs notes du 16 mai, en leur donnant la plus grande étendue. » Or, la note du 16 mai expulsant la France de l’Allemagne, de la Hollande et de l’Italie, cette plus grande étendue à donner à la paix s’entendait aisément de la rive gauche allemande du Rhin et de la Belgique. L’accord qui s’établit sur ce principe entre Metternich et Nesselrode reçut l’approbation de l’empereur François. Ainsi furent dressés les articles d’un traité, en vue du cas où Napoléon repousserait les conditions de l’Autriche. L’article premier porte :


S. M. l’empereur d’Autriche, ayant invité les cours de Russie et de Prusse à entrer sous sa médiation en négociation avec la France pour une paix préalable et qui puisse servir de base à une paix générale, et S. M. ayant fixé les conditions qu’Elle croit nécessaires au rétablissement d’un état d’équilibre et de tranquillité durable en Europe, Elle s’engage à déclarer la guerre à la France et à joindre ses armes à celles de la Russie et de la Prusse, si, jusqu’au 20 juillet de cette année, la France n’a point accepté ces conditions.


Ces conditions, ce sont les quatre points. Il n’est dit nulle part que la Russie et la Prusse les acceptent définitivement, qu’elles s’en contentent, qu’elles n’en exigent pas d’autres ; il est bien stipulé, au contraire, que ces quatre points ne représentent que les conditions d’une paix préalable, pouvant servir de base à une paix générale, et, pour bases de cette paix, l’Autriche déclare, en prévision du refus de Napoléon, accepter déjà « les articles énoncés par les Cabinets russe et prussien dans leur note

  1. A Stadion, 23 juin 1813.