Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/873

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
867
LES ÉPOQUES DE LA MUSIQUE.

« entrepreneurs » par le prince dilettante, en témoignent avec autant de précision que d’abondance. L’exposé préliminaire des statuts est le suivant :

« Afin de remettre en usage la musique selon sa perfection, qui est de représenter la parole en chant accomply de sons, harmonie et mélodie, qui consiste au choix, règle des voix, sons et accords bien accommodés, pour faire l’effet, selon que le sens de la lettre le requiert, en resserrant ou desserrant ou accroissant l’esprit[1], renouvelant aussi l’ancienne façon de composer vers mesurés pour y accommoder le chant pareillement mesuré, selon l’art métrique ; afin aussi que par ce moyen les esprits des Auditeurs, accoutumés et dressés à la musique par forme de ses membres, se composent pour être capables de plus haute connaissance, après qu’ils seront repurgés de ce qu’il pourrait leur rester de la barbarie, sous le bon plaisir du Roy notre souverain seigneur. Nous avons convenu dresser une Académie ou Compagnie composée de Musiciens et Auditeurs sous les lois et conditions qui ensuivent[2]. »

Ainsi, dès les premiers mots et jusque dans le titre des membres de l’Académie, se révèle non seulement l’importance mais la primauté de la musique. « Poètes, savans, érudits chargés d’écrire les poèmes[3], » étaient, aussi bien que les compositeurs eux-mêmes, désignés sous le nom de Musiciens. « Auprès d’eux se groupaient six virtuoses qualifiés de chantres et de joueurs d’instrumens[4] » qui exécutaient les œuvres lyriques devant les Auditeurs, « seconde classe d’ « académiques, » subordonnée à celle des Musiciens[5]. »

En des lettres patentes animées du même esprit que la requête à lui soumise, Charles IX se déclare le protecteur et, modestement, le premier Auditeur de l’Académie. Poète et musicien lui-même, il prend en ses mains royales la cause de la musique et celle de la poésie, ou plutôt, de l’une et de l’autre cause il ne fait qu’une seule, et la réforme ou la restauration des deux arts ne lui paraît, comme aux fondateurs de la Compagnie qu’il approuve, consister que dans leur réunion.

  1. Le souffle.
  2. Cité par M. Fremy.
  3. M. Édouard Fremy, op. cit.
  4. Ibid.
  5. Ibid.