Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/825

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

transpercé, chacune était mortelle, mais comme il semblait que l’Empereur remuait encore, un officier tourna le cadavre sur le dos et montra avec la pointe de son épée le cœur. Un soldat s’avança, envoya une dernière balle. Le glas des cloches continuait à résonner.


III

Napoléon III fut profondément affligé. L’Impératrice fut irritée autant que consternée, car elle n’aurait pas voulu qu’on abandonnât le malheureux Maximilien.

L’empereur François-Joseph avait accepté comme tous les souverains l’invitation de Napoléon III. La mort de Maximilien ne lui permit pas de se rendre à Paris. Il marqua même, sur ce premier moment, une assez vive irritation de ce qu’après avoir tant pressé son frère d’accepter la couronne, on l’eût délaissé dans le péril. Beust eut le courage de lui dire : « Et le Hanovre ? C’est Votre Majesté qui a invité le roi George à prendre l’attitude qui lui a coûté son royaume : et cependant il vous a été impossible après Sadowa de venir à son secours. Il n’était pas davantage possible à Napoléon III de se jeter dans une guerre contre les Etats-Unis pour sauver votre frère. » Des lettres très affectueuses des Tuileries, exprimant un profond chagrin, achevèrent de calmer François-Joseph, et il consentit de tout cœur à recevoir à Vienne les condoléances que l’Empereur et l’Impératrice demandaient à lui apporter. Le lieu de la rencontre fut fixé à Salzbourg.

Napoléon III, désireux de ne pas réveiller les susceptibilités à peine calmées de l’Allemagne, chargea Göltz de porter au roi de Prusse, à Ems, et transmit, par notre ambassade à Berlin, les explications les plus rassurantes sur le caractère de son voyage : c’était une pure visite de condoléances, bien naturelle après le malheur qui venait de frapper la famille impériale d’Autriche. Il laissait même entendre qu’à son retour, il se proposait de rendre au roi de Prusse sa visite à Coblentz.

Il ne donna aucun caractère officiel à son voyage. Quoiqu’il gardât l’incognito, il trouva cependant à la gare d’Ulm (17 août), le roi de Wurtemberg, et à celle d’Augsbourg (18 août), le roi de Bavière, qui l’accompagna jusqu’à la frontière de ses États. Les populations autant que les souverains accouraient sur ses pas,