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raccordant à la terre ferme par des rampes à inclinaison variable suivant la flottaison et l’enfoncement du navire. C’est ainsi que fonctionnent les ferry-boats de New-York et du lac de Constance et les bateaux transbordeurs de même nature sur les deux rives du lac Baïkal, dont la traversée constitue la soudure des deux parties du chemin de fer transsibérien. Mais la manœuvre de ces bacs est déjà un peu lente et laborieuse, elle le serait plus encore pour un transit intensif comme celui du Pas de Calais et ne pourrait être dès lors pratiquement employée.

D’après des études récentes, le problème pourrait très bien se résoudre de l’a manière suivante. Le bateau porte-train serait amené dans une darse abritée de son port d’attache tant sur la rive française que sur la rive anglaise. Là il reposerait sur un plancher mobile qui serait soulevé par des presses hydrauliques ; et le pont du bateau, muni de rails, serait amené exactement à la hauteur invariable des voies de terre dont il serait le véritable prolongement. Le bateau étant ainsi de jaugé et immuable, les manœuvres d’embarquement et de débarquement se feraient avec la rapidité et la facilité des opérations de même nature dans toutes les gares de chemin de fer. Une manœuvre inverse du plancher mobile remettrait le bateau à flot, prêt au départ. D’après quelques premières études, le navire porte-train aurait une longueur de 150 mètres environ, une largeur au maître-couple de 16 à 18 mètres, un creux de 4 à 5 mètres et pourrait porter trois trains, accolés, de 18 voitures chacun, soit 4 000 tonnes au moins. Son déplacement total en pleine charge serait de 6 000 tonnes environ ; sa machine motrice, de 10 000 chevaux, lui permettrait de franchir le détroit dans une heure. C’est la vitesse de 18 nœuds, que l’on obtient couramment de beaucoup de paquebots.

Le problème mécanique du soulèvement d’un plancher sur lequel reposerait un bateau, dont les dimensions seraient celles que nous venons d’indiquer, est considéré par les constructeurs les plus compétens et les plus autorisés comme une application courante de procédés déjà mis en œuvre ; et on a pu calculer très exactement que ce soulèvement pourrait être facilement obtenu par des machines de 1 000 à 1 200 chevaux, et que l’opération ne durerait pas plus de cinq minutes. Le mécanisme pourrait être d’une très grande simplicité, et la manœuvre des ascenseurs des Fontinettes permet de donner à ce sujet les meilleures garanties.