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près telle quelle. Mais il n’en a pas été ainsi dans les villes. Là, des changemens se sont produits, et le parti républicain libéral a le droit de les compter à son actif. Paris est repris par le gouvernement, soit ; mais Lille lui échappe avec presque toute la région du Nord ; et il en est de même de Bordeaux, de Bourges, de Caen, de Versailles, de Nancy, de Bar-le-Duc, d’Alençon, de Saint-Lô, de Poitiers, de Niort, de Perpignan, de Clermont-Ferrand, d’Avignon, de Privas, etc. Il gagne, à la vérité, Melun, Vesoul, Agen, Mende, Annecy, Troyes, Dijon ; mais, on le voit, la balance ne penche pas de son côté. Encore ne parlons-nous que des chefs-lieux de départemens, sinon il faudrait citer Le Havre, et tant d’autres villes plus ou moins importantes où les radicaux ont été battus et où la municipalité est passée entre les mains des modérés. Ceux-ci ont maintenu leurs positions à peu près partout, à Beauvais, à Chartres, à Nevers, etc., et notamment à Marseille, où la lutte a été plus vive que partout ailleurs et où les chances du parti modéré ont paru un moment compromises.

On connaît la situation de cette malheureuse ville, qui a été longtemps si mal administrée par les socialistes, et qui est restée troublée, agitée par des fermens révolutionnaires que le ministère actuel a entretenus avec la plus criminelle imprudence. Les grèves qui ont déjà porté une atteinte si grave à sa prospérité ont été un des plus clairs résultats de cette politique. Les deux partis, à Marseille, sont représentés par deux hommes dont chacun avait sa liste : M. Chanot, le maire actuel, et M. Flaissières, le maire d’autrefois, qui, chassé de l’Hôtel-de-Ville il y a quatre ans, aspirait à y rentrer en maître. Le gouvernement a tout fait en faveur de M. Flaissières. Sur ce point comme sur tant d’autres, M. Combes a rompu avec la politique de M. Waldeck-Rousseau, qui avait su mettre M. Flaissières à sa place et le tenir à distance. M. Combes s’est rendu de sa personne à Marseille, et M. Flaissières s’est empressé d’organiser des manifestations autour de lui dans l’espoir qu’elles tourneraient finalement à son propre profit. M. Flaissières ne s’est pas séparé un moment de M. Combes. M. Combes a tenu constamment le langage qui convenait le mieux à M. Flaissières. Depuis, M. Vallé, ministre de la Justice, et M. Doumergue, ministre des Colonies, sont allés entretenir le mouvement. M. Pelletan, qui est député des Bouches-du-Rhône, a lié partie avec l’ancien maire. M. Jaurès était, il y a quelques jours, à Marseille, où il donnait de toutes ses forces. Rien n’a été négligé pour assurer le succès du parti socialiste. La grève des inscrits maritimes est venue lui apporter un nouvel appoint en rendant