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articles du traité de 1839. L’Italie ayant été convoquée sur la proposition de l’Angleterre, « à cause de la position qu’elle occupe aujourd’hui dans la famille européenne, » l’Espagne demanda aussi à siéger ; on lui dit que sa demande était trop tardive et qu’on n’avait plus le temps de l’examiner


XI

Stanley, en vue de hâter les travaux de la Conférence, prépara un projet, de traité et le communiqua aux divers cabinets. Dans ce projet, l’arrangement relatif à la position future du Grand-Duché et à l’évacuation et au démantèlement de la forteresse était réglé avant la neutralisation du Duché, et cette neutralité n’était point placée sous la garantie collective de l’Europe. Moustier, qui ne demandait qu’à en finir n’importe comment, ne fit aucune objection. Bismarck réclama : l’évacuation ne devait être présentée que comme la conséquence de la neutralisation et la garantie collective était la condition sine qua non, la seule qui pût rendre l’évacuation tolérable à l’Allemagne : c’était à prendre ou à laisser. Stanley concéda alors une clause semblable à l’article 2 du traité de 1863 sur les îles Ioniennes, par lequel chacune des parties contractantes s’engageait à respecter le principe de garantie qui y était posé. On en était là le matin du 7 mai, jour de l’ouverture de la Conférence.

Le plénipotentiaire prussien Bernstorff vint informer Stanley qu’il n’entrerait pas à la Conférence s’il ne consentait pas à une garantie collective telle que celle qui couvrait la Belgique. Cette exigence n’était pas inquiétante. Qui dit garantie collective dit garantie le plus souvent illusoire : sans doute, cela donne le droit de faire la guerre, mais cela n’en impose pas l’obligation ; si toutes les puissances sont décidées à exercer ce droit, celui qui médite de violer la neutralité s’arrêtera ; si quelques-unes refusent d’agir, une seule n’est pas tenue de suppléer celles qui s’abstiennent. Les arrangemens de la Pologne, quoique garantis collectivement par l’Europe, avaient été ainsi violés par la Russie sans qu’aucune puissance en prît la défense. Mais Stanley, esprit net, précis, bien intentionné, était très timoré. L’Angleterre avait déjà garanti, par le traité de 1839, la possession du Luxembourg au roi de Hollande. L’idée d’aggraver cette première garantie en y joignant celle de la neutralité du Grand-Duché