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(19 avril). » La Reine s’adressa en termes pressans au roi de Prusse. Tous à l’envi se portaient garans des dispositions conciliantes de l’Empereur.

Tant que la surexcitation du sentiment allemand lui en fit en quelque sorte une loi, Bismarck avait refusé de comparaître devant le tribunal européen auquel Moustier l’avait assigné du haut de la tribune. Mais cette surexcitation s’était, elle aussi, lassée. Il crut le moment venu de se départir de la hautaine résistance, qui, s’il y eût persisté plus longtemps, l’obligeait fatalement aux mesures extrêmes. Il pria son ami Gortchakof de proposer comme médiateur un arrangement dont ils seraient d’avance convenus ensemble. Celui-ci, qui ne s’était abstenu que dans la crainte de le gêner, se hâta d’intervenir. Il proposa la réunion d’une conférence à Londres sur la base de la neutralisation du grand-duché de Luxembourg, placé dorénavant sous la garantie de l’Europe, ce qui entraînerait l’évacuation de la forteresse devenue inutile (26 avril). Il avait été entendu qu’on écarterait tout examen des récentes annexions de la Prusse et qu’elle ne prendrait pas l’engagement préalable de retirer sa garnison de la forteresse : promettre cette évacuation avant la Conférence, c’eût été faire une concession à la menace de la France ; la Prusse ne se retirerait de la forteresse qu’à la demande de l’Europe, et en conséquence de la neutralisation du Grand-Duché. Napoléon III, plus las que tout le monde, était résigné à tout subir. Metternich lui ayant demandé avec inquiétude s’il consentirait aux exigences de Bismarck, loin d’y opposer des objections, il les accepta presque chaleureusement (27 avril). « Les nouvelles sont à la paix, écrit Vaillant ; tout le monde s’en réjouit outre mesure, un peu sans pudeur ! Il faut qu’on ait eu bien peur[1]. »

Les conditions que Stanley exigeait avant de consentir à la Conférence étaient réalisées, puisque les parties étaient d’accord sur un programme commun. Il donna son assentiment à la convocation à Londres. Il exigea seulement que les invitations fussent faites par le roi de Hollande en sa qualité de souverain territorial. La France accepta cette condition comme elle avait accepté les précédentes. Bismarck n’ergota pas. La Russie fit demander au roi de Hollande de fixer la date au 7 mai. La Belgique se fit admettre en sa qualité de signataire des vingt-quatre

  1. Carnet du 27 avril 1867.