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que dans l’île de Madagascar, le Révérend Ellis a évalué à 3 000 par an le chiffre des victimes de cette pratique stupide. Elle a d’ailleurs été abolie par le gouvernement hova, sur les instances des missionnaires anglais, ainsi d’ailleurs que la traite. C’est sur les conseils du pasteur Coillard que le roi Levanika a interdit cette épreuve par le poison chez ses sujets les Ba-Rotsis[1].

Au Congo belge, le roi Léopold a fait nommer une commission pour la protection des indigènes (1896) ; ce comité, composé en grande partie de missionnaires, a pour but d’abolir les sacrifices humains et les épreuves judiciaires. De son côté, le vice-roi des Indes anglaises y a supprimé ou tend à supprimer dans les pays tributaires, par exemple en Birmanie, les suttis, les tortures préliminaires au jugement et les châtimens barbares. Le Japon, depuis une vingtaine d’années, s’est montré digne de prendre rang parmi les nations civilisées, en abolissant les supplices infligés au coupable et en améliorant l’état sanitaire des prisons et la condition morale des détenus. Le gouvernement du mikado, sur les avis du Révérend Berry, a autorisé les missionnaires chrétiens à essayer la cure d’âmes sur les criminels ; il a créé, — chose inconnue en Europe, — une école normale de geôliers, a institué le groupement des prisonniers suivant le sexe, l’âge et la nature du délit, et enfin organisé à Okohama un home pour les libérés. La prison de Hokkaïdo, de l’aveu d’hommes compétens, peut être citée comme un modèle, même à des réformateurs américains. Au contraire, la Chine et la Corée, où l’influence des missionnaires est à peu près nulle, se sont montrées réfractaires à cette humanisation du régime des prisons.

La malpropreté physique, disions-nous, à propos de l’Hindoustan, est très souvent l’indice de l’impureté morale et de la débauche. D’après cela, ce pays, la Chine et l’Arabie devraient être classés au dernier échelon de la moralité, comme aussi de l’hygiène.

On sait d’ailleurs que la négligence des règles élémentaires de l’hygiène est la principale cause des épidémies de choléra, de peste, et des maladies cutanées, en particulier de la lèpre, qui sévit encore au Nord de l’Inde, en Océanie, à Madagascar. Qu’on ajoute à cela les recettes des médecins indigènes, qui ressemblent beaucoup aux formules de nos charlatans, et l’on se

  1. Au Vieux Calabar, on se sert de la fève de l’éséré pulvérisée, et, à Madagascar, de la racine de tangéna.