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spécialement consacrées à une école locale. Tels sont, pour l’école flamande, les musées de Bruxelles et d’Anvers ; ceux d’Amsterdam et de La Haye, pour l’école hollandaise ; celui de Cologne, pour l’ancienne école allemande, et l’Académie des Beaux-Arts à Venise, pour l’école vénitienne. Dans certaines villes, enfin, d’autres musées ne renferment presque exclusivement que les œuvres d’un seul artiste, qui y est né ou qui y a vécu : celles du Corrège à Parme, d’Holbein à Bâle, de Memling à Bruges, de Frans liais à Harlem, etc.

A côté de ces collections d’Etats ou de grandes villes, des particuliers en ont amassé d’autres plus ou moins choisies, plus ou moins importantes, mais dont quelques-unes ne le cèdent en rien aux premières : telles sont encore aujourd’hui les galeries du prince Doria à Rome ; à Paris, celles de M. Rodolphe Kann, celles de M. le baron A. de Rothschild et de Mme Ed. André ; celles de M. Six à Amsterdam ; du prince Liechtenstein à Vienne ; en Angleterre, celle du duc de Westminster, de lord Ellesmere, etc. Plusieurs d’entre elles, comme celles du prince Borghèse à Rome et de sir Richard Wallace à Londres, sont devenues la propriété des gouvernemens italien et anglais. Mais, avec la hausse des œuvres d’art, ces collections privées représentent un capital immobilisé d’une valeur telle que peu à peu elles tendent à disparaître, dispersées au hasard des enchères dans des ventes publiques où les milliardaires américains se font désormais la plus grosse part.

En même temps que ces collections de tableaux et les grandes décorations exécutées dans les édifices publics, — églises, hôtels de ville ou palais, — nous renseignent sur le mérite relatif des artistes, les dessins de ceux-ci nous permettent d’apprécier une autre face de leur talent, soit que ces dessins aient été faits pour leur propre instruction, soit qu’ils leur aient servi d’études pour la préparation d’œuvres déterminées. Grâce à eux, nous pouvons pénétrer plus avant dans leur intimité, assister en quelque sorte à l’éclosion de ces œuvres et les suivre jusqu’à leur achèvement. De tout temps, il s’est rencontré des amateurs curieux de recueillir les confidences qu’ils nous font ainsi eux-mêmes sur leurs procédés de travail, sur leur facilité naturelle ou sur leurs efforts opiniâtres pour atteindre toute la perfection dont ils sont capables. C’est au financier Jabach que le Louvre doit le premier et superbe fonds de ses richesses en ce genre, acheté par