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additionnel mon contre-projet : « L’enseignement secondaire est libre, » ce qui eût été tout le contraire de ce qu’on venait de voter. Je fis observer que j’avais demandé l’inscription de cette déclaration en tête de la loi quand le projet que l’on discutait en première lecture était le texte primitif du gouvernement dont l’article premier était devenu l’article 2 ; et le rapporteur m’en disconvint pas, reconnaissant qu’on ne pourrait le voter sans en faire argument « contre certaines des dispositions du projet voté en première délibération. » J’en pris acte à mon tour, comme d’un aveu qu’il y avait dans le nouveau projet du gouvernement « des choses contraires à la Liberté ; et cela me suffit, » ajoutai-je ; ce qui n’empêcha pas de mettre mon amendement aux voix sur une demande de scrutin, signée en tête par M. Clemenceau ; et l’article obtint encore 98 voix contre 164 (11 février). Le scrutin, demandé par la gauche, prouvait que, sur les 262 votans, il y avait 164 républicains répudiant la Liberté votée par les représentans de 1848.

On arrivait à l’article 2, qui fut voté sans opposition jusqu’à la condition transformée par l’amendement de M. Delpech. Mais M. Waldeck-Rousseau, retenu loin de Paris par la maladie, n’était plus là pour prendre sa revanche sur M. Clemenceau, et, malgré les efforts de M. Ponthier de Chamaillard et de M. de Las Cases, sénateur tout nouvellement élu dans la Lozère et qui se montra pour son début orateur de premier ordre, l’amendement Delpech fut maintenu et l’article 2 voté dans son ensemble (séance du 12 février). Dès ce moment, sauf quelques modifications acceptées par la commission, le vote de la loi ne fut plus qu’une affaire d’enregistrement.

Je m’accuse d’avoir proposé, en vue d’améliorer certains articles, quelques légères retouches ; c’était la faute de mon éducation trop universitaire. Mais à quoi bon ? puisque, depuis le vote de l’amendement Delpech, j’étais résolu à repousser la loi. J’avais signalé en première lecture l’incorrection du mot privé, employé dans quelques amendemens à la place du mot libre ; mais il se trouvait dans un premier article déjà voté, ce qui me forçait d’ajourner à la seconde lecture mon amendement et ses raisons. Les raisons, les voici : le mot libre était déjà dans le titre du projet de loi du Gouvernement et dans celui du rapport de la commission ; il était aussi çà et là dans l’exposé des motifs du projet comme dans le texte du rapport ; il était maintenu dans les titres du projet de loi rectifié et du rapport supplémentaire. Pourquoi n’était-il pas dans le dispositif de la loi ; pourquoi ne pas l’y mettre, puisqu’il est d’un usage commun ? Quant au mot privé, il est