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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 mars.


Nous venons de traverser des jours agités et stériles. Un assaut violent a été livré au ministère : il en est sorti ébranlé, mais toujours debout. On annonce une dernière bataille. Nous ne voulons pas décourager ceux qui s’apprêtent à la livrer ; toutefois nous serions surpris, — très heureusement d’ailleurs, — si elle avait un autre résultat que les précédentes. Nous disions, il y a huit jours, que, suivant toutes les apparences, le ministère atteindrait les vacances, c’est-à-dire les élections municipales, et qu’après, on verrait. Cela demeure vrai aujourd’hui encore. Le ministère est comme un nageur à bout de forces et tout à fait incapable de fournir un long parcours, mais qui n’a plus que quelques brassées à faire pour gagner le rivage où il pourra prendre un peu de repos. Un dernier effort le sauvera. Aussi déploie-t-il une énergie qui serait admirable s’il ne s’agissait pas de lui et de sa cause : elle ne s’inspire que de l’instinct de conservation.

Les derniers incidens parlementaires ont eu un caractère nouveau, et c’est ce qui a permis d’espérer qu’on auraient un meilleur résultat que les précédens. Jusqu’ici, le ministère avait été combattu par l’opposition libérale. C’est le centre qui avait donné, et il l’avait fait avec beaucoup de vigueur et de talent : mais ses efforts étaient restés vains devant le parti pris de la majorité de ne se laisser entamer par aucun argument, fût-il le meilleur du monde, et de rester à l’état de bloc intangible. On convenait volontiers dans les couloirs que la politique de M. Combes entretenait un danger toujours croissant. Le pays, profondément troublé, se partageait de plus en plus nettement en deux