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POÉSIES

VISIONS RUSTIQUES


LE COMBAT


Les deux béliers, la haine au cœur, les yeux sanglans,
De qui le mufle écume et dont la laine sue,
Entre-choquent leurs fronts dans un bruit de massue
Et se heurtent sans trêve en de brusques élans.

Les cornes font vibrer les cornes, et les flancs
Palpitent. Mollement, sur sa couche moussue,
L’agnelle du combat sauvage attend l’issue,
Et son odeur rend fous les deux mâles brûlans.

Chaque brute est pour l’autre une vivante cible.
Le féroce rival au rival irascible
Porte des coups où sonne un double acharnement ;

Et la Nature, en son effroyable mystère,
Encadre cette lutte épique horriblement
Dans l’épique grandeur d’un paysage austère.