Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/234

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’autre. Plusieurs physiciens, entre autres Wild et Crova, ont exécuté des déterminations de ce genre. Elles ont été en accord suffisant avec les nombres déduits de la loi théorique. Les écarts, d’ailleurs, ont pu être expliqués.


V

La théorie précédente, qui attribue la diffusion bleue du ciel aux particules solides ou liquides de l’atmosphère, n’a pas complètement satisfait son propre auteur. Ces corps étrangers, dont l’existence est précaire et le destin changeant, peuvent-ils expliquer le phénomène permanent du bleu céleste ?

Le physicien anglais ne le pensa point. A son avis, les jeux de la lumière sur cette catégorie de corps ne rendaient compte que d’une partie de ce grand fait naturel, et précisément de sa partie variable. Il chercha une autre catégorie de particules qui fussent inhérentes à la constitution de l’atmosphère et il ne trouva que les particules de l’air lui-même. Il admit donc, après Brewster, que les rayons du soleil se diffusaient sur les particules gazeuses comme sur les poussières et sur les gouttes d’eau. Le mécanisme restait le même ; l’agent seul était changé : c’était un gaz au lieu d’une poussière.

M. Sagnac a adopté le même principe, mais il en a modifié l’application de manière à éviter une difficulté sérieuse du système de lord Rayleigh. Le physicien de la Faculté de Lille reproche au savant anglais d’universaliser dans toute l’atmosphère la production du bleu du ciel et de l’y répartir uniformément. Une conséquence de cette manière de voir serait que l’intensité du bleu céleste diminuerait en altitude aussi vite que la pression atmosphérique. Ce résultat est contraire aux observations. M. Sagnac substitue à la donnée trop simple d’une diffusion égale pour chaque molécule l’hypothèse d’une diffusion en rapport avec les distances mutuelles des molécules. Le bleu du ciel, alors, n’est plus répandu partout également : le ciel n’est plus confondu avec l’atmosphère. Les couches supérieures reprennent l’influence prépondérante qu’elles doivent avoir. C’est là que la diffusion bleue domine, et comme le dit M. Sagnac, l’illusion de la voûte azurée se trouve ainsi restaurée comme une réalité par la science contemporaine.


A. DASTRE.