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La seconde réfutation de l’erreur relative à la prétendue couleur bleue de l’air résulte des études de G. Muller en 1882 et des expériences exécutées en 1884 par S. P. Langley au Mont Whitney, dans les Alleghanys. Ces physiciens ont reconnu que, parmi les rayons qui composent le faisceau de lumière blanche solaire, les violets et les bleus sont absorbés plus fortement que ceux de la partie opposée du spectre, c’est-à-dire les jaunes et les rouges. Le faisceau lumineux s’enrichit donc du côté du rouge, et s’appauvrit au contraire du côté du bleu, à mesure qu’il traverse une plus grande quantité d’air. Sous une épaisseur croissante, l’air est chaudement coloré. Ce n’est pas le bleu qui est sa couleur par transmission, mais plutôt le jaune ou le rouge. Le disque du soleil, qui est blanc lorsqu’on le voit de la surface de la terre, nous apparaîtrait teinté de violet si nous le regardions des limites de l’atmosphère.

Cet appauvrissement du faisceau lumineux en radiations bleues et violettes, par suite de l’absorption atmosphérique, se continue et s’exagère même pour les radiations situées au-delà des précédentes, dans l’ultra-violet. Les radiations de cette espèce, invisibles, mais décelées par leur activité photographique, diminuent dans le faisceau solaire à mesure que celui-ci approche du sol : la diminution est surtout frappante dans les couches les plus basses. La sensibilité des plaques s’exalte en montagne. A. Cornu s’est assuré qu’une différence d’altitude de 2 000 mètres avait une influence très appréciable sur le temps de pose.


L’atmosphère renferme pourtant un gaz qui est réellement bleu, c’est l’ozone. Sa présence dans l’air est fréquente, habituelle même, puisqu’il prend naissance toutes les fois que l’oxygène est traversé par des décharges électriques. C’est en 1880 que MM. Hautefeuille et Chapuis reconnurent la couleur bleue de l’ozone, et ils ne purent s’empêcher de lui attribuer un rôle dans la production du bleu céleste. C’est une erreur : l’ozone, qui est d’ailleurs en quantité minime, ne peut être identifié avec l’azur de l’atmosphère. Cornu a montré que le bleu du ciel et l’ozone se distinguent par diverses propriétés et, entre autres, par la diversité des radiations photogéniques qu’ils émettent.

L’idée, discréditée une première fois, a reparu sous une autre forme, il y a trois ou quatre ans, lorsque l’on a commencé à obtenir en abondance les gaz liquéfiés de l’air. Ceux-ci, fournissent, en effet, des liqueurs bleues remarquables. On peut, par exemple, préparer de l’ozone très concentré et le recevoir dans l’air liquide. La solution