Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/227

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

extra-terrestre. Nous le touchons presque. Alors même qu’il s’étendrait jusqu’aux dernières limites de l’enveloppe gazeuse du globe, ce ne serait encore qu’une mince pellicule par rapport à l’ampleur et à la profondeur que lui attribuait notre esprit abusé. Il faut nous demander maintenant si même il occupe toute cette étendue restreinte, ou seulement une partie : en d’autres termes, si c’est la totalité de l’atmosphère ou une fraction, une région déterminée, qui engendrent le bleu du ciel. La physique contemporaine répond qu’effectivement, ce n’en est qu’une partie, la plus haute, la plus excentrique, celle qui forme ce que l’on appelle les couches supérieures de l’écorce terrestre.

La démonstration de cette vérité exige une analyse attentive et méthodique. Nous allons la suivre, en prenant pour guide M. Sagnac.


II

Les rayons du soleil, après avoir pénétré dans l’atmosphère, y subissent deux espèces de vicissitudes. Les uns traversent ce milieu gazeux transparent sans arrêt, sans solution de continuité, et arrivent à l’œil sans accident : les autres, se heurtant obliquement aux corps en suspension, aux poussières, aux particules d’eau ou peut-être même aux molécules gazeuses, subissent des réflexions qui les renvoient dans des directions diverses ; et, par suite de cette dissémination, donnent naissance à la lumière diffuse. Théoriquement, un faisceau de lumière blanche qui a éprouvé l’une ou l’autre de ces aventures en peut sortir coloré, et, dans le cas qui nous occupe, coloré en bleu. Nous attribuons cette couleur au milieu qui, recevant la lumière blanche, nous la renvoie avec une autre teinte, et nous disons, suivant les cas, que le milieu est coloré par transparence ou par dissémination.

C’est la question que nous devons nous poser ici. Le ciel est-il bleu par transparence ou par dissémination, ou peut-être à la fois par transparence et par dissémination ?

La réponse est nette. La coloration bleue est due à la dissémination. La transparence n’a pas de rôle dans le phénomène, et nous en donnerons les preuves. Mais il faut tout aussitôt prévenir le lecteur que cette assertion va heurter son préjugé et peut-être aussi celui de beaucoup de chimistes et de physiciens.

La coloration par transparence ou transmission est, en effet, la seule qui paraisse applicable à l’air, corps transparent. Un vitrail où l’on a incorporé de l’oxyde de cobalt, un flacon où l’on a dissous du