Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/223

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
REVUE SCIENTIFIQUE

L’AZUR DU CIEL

Le ciel est, au même titre que la terre, un objet d’étude pour les physiciens. Dans cet azur immobile et dormant qui s’étend au-delà de la sphère des nues et que les âmes méditatives interrogent avec angoisse sur le mystère des cosmogonies et des religions, eux n’aperçoivent qu’un simple phénomène naturel. Leur esprit positif, réaliste et méthodique, poursuit patiemment la solution d’un problème précis que les poètes et les philosophes trouveraient infiniment humble. Qu’est-ce que l’azur céleste ? se demandent-ils ; autrement dit, qu’est-ce que le ciel ? Quel en est le lieu ? quelles en sont les limites, quelle en est la substance, quelle en est la nature ?

Les esprits simples de tous les temps ont pu croire, comme jadis les bergers de la Chaldée, à l’existence réelle d’un dôme azuré suspendu au-dessus de nos têtes et sur lequel les étoiles seraient fixées comme autant de clous d’or. Cette voûte de bleu cristal était pour ces imaginations élémentaires le véritable support, l’appui matériel, en un mot le firmament des corps célestes. Cette illusion grossière n’est plus de mise. La sphère céleste n’est qu’un leurre. Au-delà des limites de notre atmosphère, il n’y a rien que le vide barométrique[1], l’espace interplanétaire ou intersidéral, l’espace indéfini, immatériel, éthéré, insaisissable à nos sens, sillonné seulement par les orbites des

  1. Le vide interplanétaire n’est plus le vide immatériel, d’après la nouvelle école. Pour S. Artrenius, J. —J. Thomson et un grand nombre de physiciens contemporains, l’espace interplanétaire est sillonné, rempli, par les corpuscules cathodiques, par les ions émanés du soleil, et ceux-ci sont des fragmens d’atomes, c’est-à-dire une partie de la matière même du soleil.