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le Drake. La Ligue Navale estimait ces bâtimens inférieurs aux navires français de même classe, les Duncan à nos République du programme de 1900, les Drake à nos Jules-Ferry. C’est cependant sur les plans de sir White, et bien que M. Philip Watts lui ait succédé depuis deux ans déjà, que l’Amirauté poursuit la construction de ses dernières unités de grands cuirassés, du type Edward VII.

M. Philip Watts succéda à sir W. White à la direction des constructions navales, comme il lui avait succédé dix-sept années auparavant (1885) chez les Armstrong, à Elswick, dans la direction des travaux de cet immense chantier privé. C’est là qu’il construisit, de 1885 à 1892, un grand nombre de navires de guerre pour des États étrangers, principalement pour le Japon, le Chili et la République Argentine.

Une des premières œuvres de M. Watts, dans ses nouvelles fonctions à l’Amirauté a été la mise au point des plans pour les grands croiseurs cuirassés, type Duke of Edinburgh, de 13 500 tonnes, destinés à tenir tête aux bâtimens de même ordre de notre programme de 1900.

Dans les pages qui précèdent, nous avons montré comment la marine anglaise s’est transformée depuis 1884 ; comment l’esprit public, d’abord indifférent, fut mis en éveil par les avertissemens de quelques hommes qui avaient une vue nette et précise du rôle que cette marine doit jouer comme élément essentiel, indispensable, du maintien de la grandeur et de la prospérité britanniques, même de la sécurité, de l’existence de l’empire ; comment, sous l’administration de Gladstone, si occupé que fût ce leader par les problèmes intérieurs, la poussée obstinée d’une opinion et d’une presse mieux informées obligea le gouvernement à entrer résolument dans la voie des réformes navales. Ce rapide exposé conduit à la conclusion que les dix-huit dernières années constituent une des périodes les plus importantes qui se soient encore présentées dans le cours de la glorieuse existence de la marine anglaise. La Grande-Bretagne, qui craignit un jour subitement d’avoir perdu la suprématie maritime, croit aujourd’hui qu’elle l’a reconquise.

Elle le croit, mais elle voudrait en être tout à fait convaincue, et elle ne l’est pas, elle ne peut pas l’être. Trop de rivaux ont surgi à ses côtés, et leurs efforts ont été trop puissans. A tout instant, jaillissent de nouveaux élémens d’incertitude. Aussi bien