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D’autre part, si on considère que de toutes les armes, c’est la cavalerie qui, dans une campagne, est la plus difficile à reconstituer et que jamais, à aucune époque, elle n’a été plus nécessaire, on voit à quel degré il importe de l’économiser et de ne pas l’exposer à être détruite inutilement.

Pour cette raison, il convient de repousser cette prescription de sacrifice donnée à la cavalerie comme un devoir à remplir pour dégager les autres armes en cas de retraite. Ce n’est pas son sacrifice qu’il faut lui demander, c’est la destruction de l’ennemi. La guerre de 1870 a prouvé l’inutilité des charges. Quelques escadrons pied à terre, soutenus par de l’artillerie, produiront un effet autrement puissant que ces chevauchées de la mort.

Vienne alors la bataille de plusieurs jours, où sur certains points se produiront chez l’adversaire ces effondremens du moral et de la force de résistance, qui amènent les paniques et préparent les déroutes, alors, ces escadrons qui n’auront pas été sacrifiés mais aguerris, tenus aux aguets près de la ligne de feu, attentifs aux péripéties de la lutte, pourront agir soudainement par le sabre. Ce seront de nouveau les victorieuses chevauchées, dans lesquelles plusieurs milliers de cavaliers traversant la bataille, ou contournant une aile, iront sur les derrières s’emparer des passages obligés de la ligne de retraite, s’y établiront solidement et, partant de ces nouveaux points d’appui, attaqueront l’adversaire à revers par leurs feux.

Alors se produira l’événement, que le génie de Napoléon savait si bien amener au moment psychologique, car, pour des troupes durement engagées depuis de longues heures, l’événement sera toujours d’entendre soudainement le canon derrière elles. C’est à ce résultat que doit tendre toute la volonté, toute l’énergie du chef, et la cavalerie de l’avenir, au moyen de ses armes à feu, et grâce à sa vitesse, en donnera la possibilité. Bientôt les pouvoirs publics reconnaîtront que nous ne devons plus avoir qu’une seule sorte de cavalerie, dont l’espèce des chevaux différenciera seule les régimens.

On voit les difficultés nouvelles que rencontrent les reconnaissances. Cependant, les instructions sur le service en campagne de toutes les armées, insistent sur la nécessité d’obtenir des renseignemens plus complets et plus minutieux que jamais. Il est prescrit à tout chef qui doit attaquer, de déterminer d’abord l’étendue de la position qu’occupe l’ennemi, ses parties