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Tables correspondent aux trois étapes de la vie universitaire. Je viens de faire une esquisse de l’étudiant des trois premières années, et ce portrait est plutôt flatté, puisqu’il permet au lecteur de croire que la paresse est le seul vice connu à Oxford et à Cambridge. Quant aux bacheliers qui résident d’une façon permanente et concourent pour les fellowships, il faut reconnaître que, dans cette zone-là, on respire un air un peu plus chargé d’intellectualité. Mais cette activité d’esprit se perd en conversations, en discussions, en lectures. Peu de travail régulier et méthodique. On a peur d’être trop sérieux : on sourit des emballés ; on adopte une certaine altitude douteuse et narquoise, qui est commode pour les médiocres et qui passe pour élégante.

Au-dessus des bacheliers qui attendent une fellowship, s’étend le troisième cercle universitaire, qui est habité par les Dons : ce sont les fellows qui se sont décidés à passer leur vie à l’Université, contens de remplir dans leur collège des fonctions professorales ou administratives. Beaucoup se marient et vivent d’une vie un peu étroite et monotone qui rappelle trop celle des petites garnisons. Dans ce milieu, le génie serait paralysé et le talent a peine à se développer. Il faut des circonstances bien rares pour qu’il sorte de là un beau livre ou une grande découverte. Les hommes de second et de troisième ordre s’y assoupissent dans une léthargie qui n’est pas sans douceur, mais qui a, pourtant, des réveil amers. Et la vie s’achève, qu’on délibère encore sur la meilleure façon de l’employer.

Tout ce que je viens d’écrire est admis des universitaires eux-mêmes. Aussi les Universités ont-elles fait des efforts extraordinaires pour se réveiller, se rajeunir, se mettre à la mode et au courant ; mais j’espère ne pas être considéré comme un impertinent si j’ajoute qu’elles n’y ont pas encore réussi. Les exclusions religieuses ont disparu ; l’obligation du célibat, qui faisait des fellows de véritables moines, a été supprimée. Oxford a modernisé ses bibliothèques et Cambridge a perfectionné son outillage scientifique et ouvert ses laboratoires aux gradués des autres Universités sous le nom d’advanced students et de research students. Les deux Universités ont pris une part active dans l’œuvre des Social settlements, que j’ai décrite ici même ; elles ont aussi largement contribué au mouvement de l’University Extension et ont cherché, par les examens locaux auxquels leur nom reste attaché, à exercer un contrôle sur l’enseignement secondaire.