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C’est son angélus matinal
Qui m’apportera, comme un leurre,
Un écho du pays natal
Pour adoucir ma dernière heure ;

Et je m’endormirai soudain
Aux sons de sa claire musique,
Comme un enfant de citadin
Que berce une chanson rustique.

CHEMINERESSE[1]


Dès la prime aube, à la fraîcheur,
O lire laire,
Je vais dans le jardin en fleur
De celle qui m’a pris le cœur,
O lire lire !

Autour de ses roses vermeilles
Si fort bourdonnent les abeilles
Que leur musique la réveille !

A sa fenêtre, sous les toits,
O lire laire,
Un volet s’ouvre et je la vois,
Fraîche comme un muguet des bois ;
O lire lire !

« J’aime tes roses, ô ma brune !
Veux-tu, ce soir au clair de lune,
Me permettre d’en cueillir une ?

— Non, les roses de mon jardin,
O lire laire,
Seront à qui viendra demain
M’apporter le soleil en main...
O lire lire ! »

  1. Dans le langage de la poésie populaire, on nomme Chemineresses les rustiques mélopées que les pâtres, en poussant leurs troupeaux, les valets de ferme, en chevauchant leur bidet, chantent pour accourcir le chemin ; c’est la chanson de route des paysans.