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tirailleurs, quelquefois sur trois lignes, distantes de 200 à 300 mètres. Les fronts sont ainsi de 600 à 800 mètres et parfois de 1 000 mètres par bataillon, les compagnies ayant souvent entre elles de larges intervalles où viennent s’encadrer les soutiens. L’ouverture du feu se fait souvent entre 1 500 et 1 000 mètres, ce qui amène une action de feu prolongée sur le front. Chaque bataillon a une mitrailleuse qui vient se placer sur la ligne même des tirailleurs.

Il convient de dire que le commandement et la direction de ces longues lignes est manifestement difficile. Une telle formation est rigide malgré son extrême dispersion, elle se prête mal à l’utilisation des points d’appui et à la marche en terrain couvert. Elle est aussi vulnérable qu’une série de sections espacées en raison des méthodes de tir de l’artillerie moderne qui permettent d’arroser uniformément une zone très étendue.

L’artillerie fait surtout usage du tir direct. Chaque batterie ouvre le feu dès qu’elle est prête. Elle appuie de près les attaques de l’infanterie ; l’artillerie lourde est employée d’après les vues du commandement supérieur.

Dans la bataille, c’est l’enveloppement d’aile qui est surtout recherché. La manœuvre du 17 septembre en a donné l’exemple. Devant la marche offensive du général French, le maréchal Wood s’était arrêté à Lambourndown, à 50 kilomètres environ de sa situation première. Il avait pris position et s’était retranché. Le général French commença aussitôt un mouvement tournant à grande envergure, qui obligea le maréchal Wood à abandonner sa position et à accepter le combat hors de la région où il l’avait préparé. Dans son mouvement, le général French n’a pas craint d’étendre son front sur 16 kilomètres pour un effectif de 17 500 hommes. Ainsi parait dominer la préoccupation de mettre en action tous les moyens dont on dispose, et à cet effet, d’étendre le front autant qu’il est nécessaire. La conception d’un coup de force, exécuté au moyen de grosses réserves et préparé par un violent combat d’usure sur tout le front, est donc complètement abandonnée.

Comme en Allemagne, les troupes ne combattent que couchées. La préoccupation de diminuer la visibilité est poussée si loin que la tenue de campagne de toutes les troupes est la même. La cavalerie ne se distingue de l’infanterie que par les éperons à la chevalière. La carabine lui a été retirée et rem-