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VERS ISPAHAN

DERNIERE PARTIE[1]

Derrière cette ville de la sultane Zobéide, qui vient de nous montrer si soudainement là-haut ses mille coupoles et qui a l’air d’une grande apparition tout en cuivre rose, ce sont bien de vrais nuages cette fois, qui forment ce fond si sombre ; — des nuages où la foudre, à chaque minute, dessine des zigzags de feu pâle. La tourmente d’où nous sommes à peine sortis, la tourmente de poussière et de sable, continue sa route vers le désert ; nous voyons fuir sur l’horizon derrière nous son voile lourd et son obscurité dantesque. De plus en plus, tout se précise et s’éclaire, les choses redeviennent réelles ; nous roulons maintenant au milieu des champs de l’oasis, un peu dévastés par la bourrasque, des champs de blé, de pavots, de coton et de riz. Quant à la ville, d’un premier aspect merveilleux auquel nous ne nous sommes plus laissé prendre, ce n’est comme toujours qu’un amas de ruines. — Et il s’agit maintenant d’y entrer, ce qui n’est pas tout simple ; pour un cavalier, ce serait déjà difficile ; mais, pour une voiture à quatre chevaux de front, cela devient un problème ; il faut longtemps chercher, essayer d’un chemin, reculer, essayer d’un autre. Nulle part le travail de ces fourmis humaines, que sont les Iraniens, n’a été plus fouilleur

  1. Voyez la Revue du 1er décembre, des 1er et 15 janvier et du 1er février.