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Il faut qu’elle y revienne ou qu’elle y rentre. Et les instructions pontificales désignent ou rappellent avec précision les voies ouvertes à son retour.

Le Motu proprio partage la musique d’église en trois genres : chant grégorien, chant palestrinien et musique moderne. Mais le partage est fort inégal, et les prescriptions autant que les restrictions édictées par le Saint-Père établissent fortement le privilège des deux premières formes, surtout du chant grégorien.

« Le chant grégorien est le chant propre de l’église romaine, le seul qu’elle ait hérité de ses anciens Pères, qu’elle ait conservé jalousement à travers les siècles dans ses codes liturgiques et qu’elle propose directement comme sien à ses fidèles ; le seul qui soit prescrit exclusivement en certaines parties de la liturgie et que des études récentes aient rétabli dans son entière pureté.

« C’est pour de tels motifs que le chant grégorien fut considéré de tout temps comme le modèle suprême de la musique sacrée et qu’on peut avec pleine assurance établir cette loi générale : une composition d’église est d’autant plus sainte et liturgique, que, par l’allure, l’inspiration et le goût, elle approche plus de la mélodie grégorienne ; au contraire, elle est d’autant moins digne du temple qu’elle s’éloigne davantage de ce type souverain. Le chant grégorien traditionnel devra donc être rétabli largement dans les cérémonies du culte, chacun tenant pour certain que les offices ecclésiastiques ne sauraient rien perdre de leur solennité à n’être pas accompagnés d’une autre musique que celle-là. »

Passant ensuite à la polyphonie du xvi» siècle et spécialement à celle de l’école romaine dont Palestrina fut peut-être le plus grand maître, mais non pas le dernier, le Motu proprio s’exprime ainsi : « La polyphonie classique se rapporte parfaitement bien à cette forme par excellence de la musique d’église qu’est le chant grégorien. Par cette raison, elle a mérité d’être associée au chant grégorien dans les cérémonies les plus solennelles de l’église, comme celles de la chapelle pontificale. Il faut donc la restituer elle aussi, largement, dans les offices ecclésiastiques. »

De ces deux genres de musique, si le premier possède « in grado sommo » (au suprême degré) le caractère vraiment religieux, l’autre en est doué encore à un degré excellent, « in ottimo grado. » Ainsi la hiérarchie n’est pas douteuse ; mais elle n’a rien non plus de rigoureux, et l’expresse volonté du pontife n’est pas d’opposer les deux types, mais de les distinguer légèrement et de les réunir.