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en étudiant les chefs-d’œuvre dont abonde le sol romain quelles se pénétrèrent du culte de la beauté, à la fleur étincelante et féconde, pour rappeler la belle expression de Leconte de Liste. Comme Poussin, comme Lorrain, comme Houdon, comme David, pour ne citer que ces Français, fils de Rome, c’est à ce contact que presque tous nos maîtres prirent le goût de l’harmonie, des nobles lignes, des proportions heureuses.

Pas plus cependant que toute autre institution, l’Académie de France, dans les polémiques du jour, ne pouvait échapper ni aux attaques violentes, ni aux critiques exagérées ou injustes. A diverses reprises, on est allé jusqu’à demander sa suppression. D’autres fois, on a cru faire envers elle preuve d’une méritoire générosité en préconisant sa transformation dans des conditions telles qu’il ne subsisterait, pour ainsi dire, rien de son passé, de ses traditions, de son enseignement. Dans ce système, la villa Médicis se trouverait réduite au rôle d’une sorte d’auberge ouverte à tout venant et où descendraient, si bon leur semblait, les boursiers de l’Etat ou les amateurs en voyage. Ces fâcheux projets paraissent, tout au moins pour l’instant, avoir fait long feu, et l’on ne saurait trop s’en féliciter. Les fêtes récentes par lesquelles a été célébré le centenaire de l’installation de l’Académie de France à la Villa Médicis ; — l’universel et éclatant hommage rendu à la pléiade d’artistes qui en sont sortis et qui ont porté si haut le renom de l’art français ; — la part importante que, sans sortir de sa sphère, l’Académie de France, dont les directeurs ont su, avec un tact si heureux et une courtoisie si goûtée de la société romaine, maintenir les vieilles traditions hospitalières, a prise au rapprochement de deux nations unies par tant d’ineffaçables souvenirs ; — en un mot, tous ces faits heureux, si honorables pour la grande école française que nous possédons à Rome, semblent avoir triomphé de tendances aussi regrettables et aussi inquiétantes, en lui ramenant, nous ne dirons point la faveur, mais la justice de l’opinion. La pire des erreurs, en effet, ne serait-elle pas de dénaturer, on pourrait dire d’annihiler, l’enseignement si fécond qui pour les pensionnaires de l’Académie résulte de leur séjour dans la Ville Eternelle et des modèles, des chefs-d’œuvre que, sans cesse, il met sous leurs yeux ? A propos d’une récente exposition d’envois de peinture « qui justifiaient peu les espérances qu’on avait pu concevoir du mérite de leurs auteurs, » le rapport présenté à l’Académie