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et plaça cette école sous la surveillance de l’agent diplomatique de la République française. A vrai dire, cette innovation n’en était pas une, les ambassadeurs du Roi s’étant précédemment, depuis la fondation de l’Académie, appliqués à être pour elle d’attentifs et dévoués protecteurs, conformément aux constantes instructions des secrétaires d’Etat aux Affaires étrangères.

Un autre décret, du 1er juillet 1793, décida que le traitement annuel des pensionnaires, pendant leur séjour à Rome, serait de 2 400 francs. Bien que la valeur de l’argent ait depuis lors beaucoup baissé, le chiffre de cette indemnité a été très peu augmenté. En vain a-t-on, à diverses reprises, démontré son insuffisance ; c’est avec ces trop faibles moyens que les pensionnaires doivent pourvoir non seulement à leur entretien, mais aussi aux frais de tout ordre qu’exigent leurs études et le juste souci du rang qu’ils tiennent de leur qualité même.

La suppression des fonctions de directeur fut de courte durée. Le gouvernement du Directoire reconnut qu’il n’était guère possible au ministre de France de s’occuper lui-même des détails administratifs d’une aussi importante institution. Aussi la loi du 4 brumaire an IV décida-t-elle que « le palais de Rome, destiné jusqu’ici aux élèves de peinture, sculpture et architecture, conserverait sa destination et que cet établissement serait dirigé par un peintre français ayant déjà séjourné en Italie. » C’était revenir à l’ancien état de choses. Peu après, un arrêté du 11 nivôse an IV appela à ces fonctions le citoyen Suvée, professeur de peinture à l’école spéciale du Muséum central des arts. Déjà, en 1792, on avait parlé de lui pour succéder à Ménageot, quand ce dernier avait quitté Rome. Depuis lors, Suvée, qui avait dû à sa qualité d’ancien peintre du Roi d’être classé parmi les suspects, avait connu de dures épreuves. Enfermé à Sainte-Pélagie avec André Chénier, dont il a laissé un très intéressant portrait, peint dans cette prison même, Suvée, plus favorisé que l’illustre poète, avait échappé « au noir messager des ombres ; » quelques heures avant le moment où il devait monter à l’échafaud, il avait été délivré par le 9 thermidor.

Comme Wleughels, l’un de ses prédécesseurs à l’Académie, comme les Coypel, les Van Loo, les Caffieri, comme beaucoup d’autres qui ont attaché leurs noms à l’histoire de l’art français, le nouveau directeur et futur réorganisateur de notre Ecole de Rome était d’origine étrangère. En matière de naturalisation.