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tant que ledit sieur Poërson exercera son employ et pour le remplacer en qualité de directeur de l’Académie royale établie à Rome, dès le moment même que ledit sieur Poërson n’exercera plus, soit par démission, soit par mort. » C’était un mandataire jouissant de toute sa confiance que d’Antin envoyait à Rome. Il le marque assez en écrivant à Wleughels, aussitôt après sa nomination : « Ecrivez-moy librement tant sur les élèves que sur toutes autres choses qui peuvent être à l’Académie que j’ai toujours eu au cœur ; vous pouvez le faire hardiment, car je ne commets jamais personne. »

Wleughels se conforma fidèlement à ces instructions. Les renseignemens qu’il adresse à son chef sur les travaux des élèves, sur leurs aptitudes, sur les conseils qu’il leur donne, sont aussi nombreux que précis : « Je croirais, écrit-il le 8 août 1724, — reprenant ainsi la tradition d’Errard, fondateur de l’Académie, au temps de Colbert, — qu’on devrait donner à copier, surtout aux peintres, les plus beaux tableaux de ce pays et puis, après, leur laisser faire quelque chose d’invention, car ce n’est pas pour en faire des copistes qu’on les a envoyés icy, mais bien pour en faire des grands hommes qui remplissent à leur tour la place des habiles gens. »

Wleughels s’appliqua sincèrement à ménager l’amour-propre de Poërson, « lui faisant mille civilités qu’il aime. » Il n’y avait cependant qu’assez peu réussi, lorsque Poërson mourut le 2 septembre 1725. Bien que ce dernier eût été, pendant vingt et un ans, directeur de l’Académie, d’Antin, tout en assurant à sa veuve, à laquelle il laissa son logement au palais Mancini, une pension suffisante, fit au défunt cette oraison funèbre dénuée d’émotion : « Je suis fâché, écrit-il à Wleughels, que le sieur Poërson soit mort ; mais je suis bien aise que son employ soit vacant, car le bonhomme ne faisait que radoter depuis du temps. »

Désormais, seul directeur, Wleughels s’appliqua, comme il le dit lui-même, à remettre l’Académie dans tout son lustre : « On travaille toujours chez nous, écrit-il le 25 octobre 1725, même les festes et dimanches ; on se délasse en étudiant, soit en allant voir les belles choses dont le pais abonde, soit en dessinant quelques veuës, quelqu’idée de tableau ou quelque antique qu’on rapporte à la maison ; ainsi les campagnes, les églises, les palais, tout concourt à notre éducation ; et le soir on fait reveuë