Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 19.djvu/373

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

début de la guerre de la succession d’Espagne, et si, à ce moment, l’Académie put profiter de la venue à Civita-Vecchia de deux ou trois bâtimens marchands pour faire en France quelques-uns de ces envois d’objets d’art ou de travaux de ses pensionnaires, naguère si nombreux et désormais si rares.

Durant quelque temps, sous le nouveau pape Clément XI, après la proclamation du Duc d’Anjou comme roi d’Espagne, le crédit de la France parut se raffermir à Rome. De nouveaux élèves arrivent à l’Académie et les dépenses sont moins irrégulièrement payées. En août 1702, on voit même Mansart, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps, réclamer à Houasse un mémoire exact « des ouvrages que chacun des pensionnaires ont faits depuis qu’ils sont à l’Académie, afin qu’il puisse rendre compte au Roy et prendre les ordres de Sa Majesté pour les transporter en France. « Le rapport envoyé par Houasse à Mansart ne donne qu’une idée assez peu satisfaisante de ces travaux. En marge de ce rapport, Mansart écrit : « Je suis surpris que les Escoliez aient fait si peu d’ouvrage. J’espère qu’à l’avenir vous tiendrez la main à ce que cela aille mieux. »

Il n’en fut pas ainsi. Une nouvelle crise ayant éclaté à l’Académie, Houasse s’en plaint à Mansart, qui répond : « Tenez la main que chacun fasse mieux son devoir et soyez sévère à leur Conduite. S’ils continuent, je les chasseray honteusement de l’Académie et ils seront notez pour toute la vie comme indignes d’exercer un art à la perfection duquel on ne parvient que par un grand amour de l’estude, dont ils ne sont point capables quand ils ont un esprit si dérangé. » Houasse se lassa-t-il d’un tel état de choses ? Toujours est-il que, le poste de garde des tableaux du Roi et trésorier de l’Académie de peinture, qu’il occupait avant son départ pour l’Italie, étant devenu vacant, il fit demander par son gendre, le sculpteur Coustou, d’en venir reprendre possession. Mansart déféra à ce désir et, pour remplacer Houasse à Rome, désigna le peintre Charles Poërson, qui, nous l’avons vu, avait été, au temps de Colbert et d’Errard, l’un des premiers pensionnaires de l’Académie.

Lorsque Poërson arriva à Rome, en décembre 1704, Houasse lui apprit « qu’il y avait six semaines qu’il manquait d’argent et qu’il fallait payer dans trois semaines le loyer. » Le mobilier de l’Académie était alors dans un si piteux état, aucun achat n’ayant été fait depuis nombre d’années, que Poërson écrit :